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26 juin 2015 02:31

  Vladimir Poutine et Sergueï Lavrov rencontrent Alexis Sipras. Crédits : MID

Vladimir Poutine et Sergueï Lavrov rencontrent Alexis Tsipras. Crédits : MID

Le ton pacifique et pragmatique adopté lors du Forum économique international de Saint-Pétersbourg n’a pas fait forte impression auprès des fonctionnaires européens qui ont prolongé le 22 juin les sanctions économiques contre la Russie,  jusqu’au 31 janvier 2016. Vladimir Poutine a en retour ordonné mercredi 24 juin la prolongation jusqu’en juin 2016 de l’embargo sur la plupart des produits alimentaires en provenance de pays européens.

On s’habitue à tout

Ce sont précisément ces restrictions sectorielles qui portent le plus préjudice à l’économie russe. Ce n’est pas un hasard si l’ancien ministre russe des finances Alexeï Koudrine estime que les sanctions limitent considérablement les possibilités des entreprises russes.

Toutefois, German Gref, président de Sberbank – laquelle figure d’ailleurs dans la liste noire de l’UE – parle d’adaptation au régime des sanctions. « Même si l’on ne peut pas qualifier cette vie d’agréable, il est de toute évidence possible de vivre dans ces conditions. Le coup a été dur pour nous. Ces sept à huit derniers mois ont été très difficiles. Mais je ne m’attends pas à ce que la prolongation des sanctions ait des conséquences dramatiques », a confié le président de la banque dans les couloirs du forum de Saint-Pétersbourg.

Du côté du gouvernement, les avis sont similaires. Le ministre du développement économique Alexeï Oulioukaïev pense également que le pays « s’est habitué » aux sanctions. Le vice-Premier ministre Arkadi Dvorkovitch n’est pour sa part pas du tout disposé à qualifier l’impact global des sanctions de « considérable ». D’après lui, la chute des prix du pétrole a porté un coup bien plus fort à l’économie russe. Le premier vice-Premier ministre Igor Chouvalov évoque quant à lui les pertes des États « qui sont eux-mêmes à l’origine de ces sanctions ».

Par ailleurs, le fait que la Russie ne soit pas la seule à se trouver dans une confrontation économique avec l’Union européenne encourage les personnalités politiques russes. La Russie peut ainsi trouver des alliés parmi les autres « bad boys » de l’Europe.

Compagnons d’infortune

En lien avec ce qui vient d’être dit, tant la participation du Premier ministre grec Alexis Tsipras au forum économique que son discours sur le cercle vicieux des sanctions, sont remarquables. LaGrèce n’est en aucun cas une initiatrice des restrictions sectorielles à l’encontre de la Russie. Mais ses exportations agricoles, cruciales pour elle, souffrent fortement de l’embargo alimentaire imposé par Moscou en réaction aux sanctions européennes.

Lors de leurs négociations, Alexis Tsipras et Vladimir Poutine ont mis l’accent précisément sur les livraisons agricoles, selon Dmitri Peskov, attaché de presse du président russe.

Autrement dit, le thème des sanctions, lié dans la forme aux événements survenus en Ukraine et dans le Donbass, rejoint dans les faits un autre sujet extrêmement sensible pour l’Europe : la situation financière de la Grèce. Il est évident qu’une levée de l’embargo russe relancerait les exportations grecques et rendrait Athènes plus solvable qu’elle ne l’est aujourd’hui.

À l’inverse, le maintien du statu quo en matière de sanctions et de contre-sanctions augmenterait la probabilité d’un défaut de paiement de la Grèce. Par ailleurs, selon le Sunday Times, Berlin a adressé un ultimatum à la Grèce, l’enjoignant d’atteindre un accord avec ses créanciers, sans quoi elle devra quitter la zone euro. Le président du Conseil européen Donald Tusk a soutenu cet ultimatum en déclarant que « ce n’[était] plus le moment de jouer à qui pliera le premier et de chercher un coupable ».

Paris n’est pas aussi catégorique – François Hollande affirme qu’un tel développement des événements ne serait ni dans l’intérêt des Grecs eux-mêmes, ni dans celui des autres Européens.

Cette perspective ne réjouit pas non plus Washington. Aux dires de l’ancien ministre américain des finances Lawrence Summers, « si la Grèce fait faillite, l’Europe recevra bien moins de remboursements que si elle procède à une restructuration méthodique ». En outre, avertit l’ancien ministre, un défaut de paiement de la Grèce entraînerait une émigration massive de ses citoyens, ce qui aurait un impact sur les budgets des pays européens. Pour l’économiste américain, un rapprochement plus étroit entre Athènes et Moscou est inévitable.

Ce rapprochement est d’ailleurs déjà en cours. Il semblerait que ce soit précisément ce que Vladimir Poutine avait en tête quand il a déclaré, lors du forum, que l’Union européenne devrait applaudir la Russie pour son aide à la Grèce. « Si l’Union européenne souhaite que la Grèce s’acquitte de ses dettes, elle doit s’intéresser à la croissance économique grecque… Quel mal y a-t-il à créer des emplois en Grèce ? », a commenté le président russe.

L’entraide des pays offensés par Bruxelles ne servira peut-être qu’à atténuer le coup qu’ils ont subi, sans toutefois résoudre complètement leurs problèmes. Et même l’UE, qui s’est approprié le rôle de professeur sévère, ne sortira pas gagnante.

Jeu sans gagnants

En prolongeant les sanctions contre la Russie, les autorités européennes sont contraintes de faire des concessions financières à la Grèce. Ce sont les citoyens des pays relativement prospères du Vieux Continent qui devront ainsi payer pour le mauvais élève de l’économie européenne. Si l’on tient en plus compte des frais que doivent assumer les agriculteurs européens, le prix, notamment politique, de ces mesures augmente sensiblement.

Vu l’effet boomerang des sanctions et le besoin pour l’économie russe de s’adapter, on ne peut parler d’un quelconque gain pour la Russie. Cela n’empêche pourtant pas le ministre russe de l’agriculture Alexandre Tkatchev de faire preuve d’optimisme : « En décidant de reconduire les sanctions d’une année et demie, l’Union européenne crée les conditions propices au développement du complexe agro-industriel russe. À condition d’un soutien étatique sans précédent, le ressort des sanctions jouera en faveur de la Russie. »

Mais le soutien étatique évoqué par M. Tkatchev, c’est aussi l’argent des contribuables, qui pourrait servir à répondre à d’autres besoins. Rien qu’en 2016, par exemple, le Fonds de pension russe aura besoin d’au moins 1 700 milliards de roubles (environ 28 milliards d’euros) pour remplir ses engagements actuels.

Par ailleurs, l’absence de concurrence occidentale nuira à un rapport qualité-prix optimal en Russie. Ce qui augmentera à son tour la probabilité que quantité de produits chers et de qualité contestable se retrouvent dans l’assiette des consommateurs russes.

En ce qui concerne l’économie russe dans son ensemble, les prévisions des experts sont également peu réjouissantes. La décision de l’UE entraînera, déjà cette année, une diminution de près de 5 % du PIB russe, d’après l’ancien premier vice-président de la Banque de Russie, Sergueï Aleksachenko. Mais ce dernier parle uniquement de l’effet du maintien des sanctions européennes.

Avec de nouvelles frappes visant l’économie européenne – et la sienne par la même occasion – la Russie ne sera pas en reste. En réaction à la prolongation des sanctions européennes, le Premier ministre Dmitri Medvedev a chargé le gouvernement russe de préparer des propositions d’introduction de mesures de rétorsion. Combien de pour cent ces mesures coûteront-elles au PIB russe ? Une chose est sûre : leur effet sur la croissance économique sera négatif.

source

Vladimir Poutine et Sergueï Lavrov rencontrent Alexis Sipras. Crédits : MID

Vladimir Poutine et Sergueï Lavrov rencontrent Alexis Tsipras. Crédits : MID

On s’habitue à tout

Ce sont précisément ces restrictions sectorielles qui portent le plus préjudice à l’économie russe. Ce n’est pas un hasard si l’ancien ministre russe des finances Alexeï Koudrine estime que les sanctions limitent considérablement les possibilités des entreprises russes.

Toutefois, German Gref, président de Sberbank – laquelle figure d’ailleurs dans la liste noire de l’UE – parle d’adaptation au régime des sanctions. « Même si l’on ne peut pas qualifier cette vie d’agréable, il est de toute évidence possible de vivre dans ces conditions. Le coup a été dur pour nous. Ces sept à huit derniers mois ont été très difficiles. Mais je ne m’attends pas à ce que la prolongation des sanctions ait des conséquences dramatiques », a confié le président de la banque dans les couloirs du forum de Saint-Pétersbourg.

Du côté du gouvernement, les avis sont similaires. Le ministre du développement économique Alexeï Oulioukaïev pense également que le pays « s’est habitué » aux sanctions. Le vice-Premier ministre Arkadi Dvorkovitch n’est pour sa part pas du tout disposé à qualifier l’impact global des sanctions de « considérable ». D’après lui, la chute des prix du pétrole a porté un coup bien plus fort à l’économie russe. Le premier vice-Premier ministre Igor Chouvalov évoque quant à lui les pertes des États « qui sont eux-mêmes à l’origine de ces sanctions ».

Par ailleurs, le fait que la Russie ne soit pas la seule à se trouver dans une confrontation économique avec l’Union européenne encourage les personnalités politiques russes. La Russie peut ainsi trouver des alliés parmi les autres « bad boys » de l’Europe.

Compagnons d’infortune

En lien avec ce qui vient d’être dit, tant la participation du Premier ministre grec Alexis Tsipras au forum économique que son discours sur le cercle vicieux des sanctions, sont remarquables. LaGrèce n’est en aucun cas une initiatrice des restrictions sectorielles à l’encontre de la Russie. Mais ses exportations agricoles, cruciales pour elle, souffrent fortement de l’embargo alimentaire imposé par Moscou en réaction aux sanctions européennes.

Lors de leurs négociations, Alexis Tsipras et Vladimir Poutine ont mis l’accent précisément sur les livraisons agricoles, selon Dmitri Peskov, attaché de presse du président russe.

Autrement dit, le thème des sanctions, lié dans la forme aux événements survenus en Ukraine et dans le Donbass, rejoint dans les faits un autre sujet extrêmement sensible pour l’Europe : la situation financière de la Grèce. Il est évident qu’une levée de l’embargo russe relancerait les exportations grecques et rendrait Athènes plus solvable qu’elle ne l’est aujourd’hui.

À l’inverse, le maintien du statu quo en matière de sanctions et de contre-sanctions augmenterait la probabilité d’un défaut de paiement de la Grèce. Par ailleurs, selon le Sunday Times, Berlin a adressé un ultimatum à la Grèce, l’enjoignant d’atteindre un accord avec ses créanciers, sans quoi elle devra quitter la zone euro. Le président du Conseil européen Donald Tusk a soutenu cet ultimatum en déclarant que « ce n’[était] plus le moment de jouer à qui pliera le premier et de chercher un coupable ».

Paris n’est pas aussi catégorique – François Hollande affirme qu’un tel développement des événements ne serait ni dans l’intérêt des Grecs eux-mêmes, ni dans celui des autres Européens.

Cette perspective ne réjouit pas non plus Washington. Aux dires de l’ancien ministre américain des finances Lawrence Summers, « si la Grèce fait faillite, l’Europe recevra bien moins de remboursements que si elle procède à une restructuration méthodique ». En outre, avertit l’ancien ministre, un défaut de paiement de la Grèce entraînerait une émigration massive de ses citoyens, ce qui aurait un impact sur les budgets des pays européens. Pour l’économiste américain, un rapprochement plus étroit entre Athènes et Moscou est inévitable.

Ce rapprochement est d’ailleurs déjà en cours. Il semblerait que ce soit précisément ce que Vladimir Poutine avait en tête quand il a déclaré, lors du forum, que l’Union européenne devrait applaudir la Russie pour son aide à la Grèce. « Si l’Union européenne souhaite que la Grèce s’acquitte de ses dettes, elle doit s’intéresser à la croissance économique grecque… Quel mal y a-t-il à créer des emplois en Grèce ? », a commenté le président russe.

L’entraide des pays offensés par Bruxelles ne servira peut-être qu’à atténuer le coup qu’ils ont subi, sans toutefois résoudre complètement leurs problèmes. Et même l’UE, qui s’est approprié le rôle de professeur sévère, ne sortira pas gagnante.

Jeu sans gagnants

En prolongeant les sanctions contre la Russie, les autorités européennes sont contraintes de faire des concessions financières à la Grèce. Ce sont les citoyens des pays relativement prospères du Vieux Continent qui devront ainsi payer pour le mauvais élève de l’économie européenne. Si l’on tient en plus compte des frais que doivent assumer les agriculteurs européens, le prix, notamment politique, de ces mesures augmente sensiblement.

Vu l’effet boomerang des sanctions et le besoin pour l’économie russe de s’adapter, on ne peut parler d’un quelconque gain pour la Russie. Cela n’empêche pourtant pas le ministre russe de l’agriculture Alexandre Tkatchev de faire preuve d’optimisme : « En décidant de reconduire les sanctions d’une année et demie, l’Union européenne crée les conditions propices au développement du complexe agro-industriel russe. À condition d’un soutien étatique sans précédent, le ressort des sanctions jouera en faveur de la Russie. »

Mais le soutien étatique évoqué par M. Tkatchev, c’est aussi l’argent des contribuables, qui pourrait servir à répondre à d’autres besoins. Rien qu’en 2016, par exemple, le Fonds de pension russe aura besoin d’au moins 1 700 milliards de roubles (environ 28 milliards d’euros) pour remplir ses engagements actuels.

Par ailleurs, l’absence de concurrence occidentale nuira à un rapport qualité-prix optimal en Russie. Ce qui augmentera à son tour la probabilité que quantité de produits chers et de qualité contestable se retrouvent dans l’assiette des consommateurs russes.

En ce qui concerne l’économie russe dans son ensemble, les prévisions des experts sont également peu réjouissantes. La décision de l’UE entraînera, déjà cette année, une diminution de près de 5 % du PIB russe, d’après l’ancien premier vice-président de la Banque de Russie, Sergueï Aleksachenko. Mais ce dernier parle uniquement de l’effet du maintien des sanctions européennes.

Avec de nouvelles frappes visant l’économie européenne – et la sienne par la même occasion – la Russie ne sera pas en reste. En réaction à la prolongation des sanctions européennes, le Premier ministre Dmitri Medvedev a chargé le gouvernement russe de préparer des propositions d’introduction de mesures de rétorsion. Combien de pour cent ces mesures coûteront-elles au PIB russe ? Une chose est sûre : leur effet sur la croissance économique sera négatif.

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