Madame Agnès Saal, « démissionnée » le 28 avril dernier de la direction de l’INA après que des collaborateurs indignés eurent révélé son utilisation pour le moins laxiste des deniers publics (40.000 euros de frais de taxi, dont 6.700 pour son fils en seulement 10 mois, et ce alors qu’elle disposait d’une voiture avec chauffeur) vient de réintégrer le ministère de la Culture. Avec un titre ronflant : « Chargée de mission sur les questions de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences », révèle Le Monde.
Vous avez bien lu : trois semaines après avoir été prise la main dans le sac, on lui confie les cordons de la bourse.
Pas besoin de pointer au chômage, ni même de renoncer à son avancement ; tout juste Agnès Saal a-t-elle pris quelques vacances, enfilant les ponts à rallonge du mois de mai, et coucou la revoilà ! Fraîche et pimpante, blanche comme l’enfant qui vient de naître.
Ça gueule un peu dans le Landerneau politique, même si tout le monde, du fond de la gauche au bout de la droite, sait fort bien qu’il n’y a jamais aucune sanction contre les hauts fonctionnaires et tout aussi rarement, d’ailleurs, contre les petits. Et si, d’aventure, on finit par vous écarter, c’est juste en vous demandant poliment de rester chez vous tandis qu’on continue de vous payer à ne rien faire.
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Sommée de s’expliquer sur ce recasage éclair, preuve sans doute qu’il n’y a pas en France de problèmes d’emploi, madame Fleur Pellerin, ministre de la Culture, a expliqué au micro de RTL qu’il n’y avait là rien d’anormal. Si elle « comprend très bien l’émotion que suscite cette réintégration », elle assure qu’il s’agit « uniquement de l’application du droit » spécifique à la fonction publique. « Agnès Saal est fonctionnaire, elle est administrative civile du ministère de la Culture. Ce n’est pas une création de poste, et donc un privilège donné à Agnès Saal. C’est vraiment l’application du droit qui prévoit qu’un fonctionnaire qui démissionne lorsqu’il est à l’extérieur de son corps d’origine a vocation à être réintégré dans son ministère », tient-elle à préciser.
Mais Fleur Pellerin, comme ses chers collègues, est tellement coupée de la réalité du monde qu’elle en remet une couche : « Il ne faut pas donner l’impression qu’Agnès Saal n’a pas été sanctionnée », dit-elle. « Il y a déjà eu une réelle sanction puisqu’elle était présidente de l’INA, et qu’elle est aujourd’hui chargée de mission. C’est une vraie sanction pour le coup. » Ah ben oui, dis donc ! Peut-être même qu’elle y a perdu son chauffeur, et le droit de monter les marches du Festival de Cannes en Dior et Louboutin ?
Hélas, tout cela est exact, chère madame Pellerin, et c’est bien là le problème ! Si elle avait travaillé dans le privé, Agnès Saal aurait été virée sans indemnités et sans doute poursuivie pour abus de biens sociaux. Pas recasée à un poste créé juste pour elle, quoi que vous en disiez, cela en moins de temps qu’il n’en faut pour obtenir un rendez-vous à Pôle emploi !
Droit de la fonction publique ou pas, vos magouilles sont tout simplement scandaleuses. Vous vous demandez pourquoi les Français boudent les urnes ? La voilà, la réponse.