La gauche s'était engagée sur des milliers d'emplois supplémentaires. François Hollande lui-même, lors du congrès à Versailles, en novembre 2015, avait annoncé 5000 créations de poste qui viendraient, sous deux ans, s'ajouter aux quelque 4000 créations de postes revendiquées depuis 2013, pour un total de 9 000 policiers et gendarmes supplémentaires, à terme. Une vraie ambition.
Seulement voilà: là où le gouvernement parle d'emplois inscrits dans les dépenses de l'État, les corps chargés du contrôle du budget lui rappellent cruellement qu'un emploi programmé n'est pas toujours un emploi exécuté.
Tout est inscrit noir sur blanc dans deux documents clés. Le premier est le «Rapport annuel annexé au projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes pour 2015», relatif donc à la sécurité, sorti le 25 mai dernier. Le second, publié le même jour, est la «Note d'analyse sur l'exécution budgétaire 2015» faite par la Cour des comptes. Un document extrêmement précis, sur lequel le président de cette institution, Didier Migaud, était même auditionné ce mercredi, devant la commission des lois de l'Assemblée nationale.
On y apprend que depuis 2012, seulement 390 emplois supplémentaires ont été créés au total pour les missions police (+ 110 emplois) et gendarmerie (+ 280 emplois) du ministère de l'Intérieur. Loin des milliers de créations de poste annoncées dans les discours. Les emplois réalisés en 2012 étaient de 239.040, contre 239 430 en 2015.
Non seulement les effectifs ont quasiment stagné, mais la Cour des comptes révèle que les plafonds d'emplois pour 2015, c'est-à-dire, les emplois inscrits au budget, qui étaient de 242.412, se sont soldés in fine par 2865 emplois de moins que prévu.
Dans le détail, c'est 1390 emplois de moins que prévu pour la police et 1077 de moins qu'annoncé pour la gendarmerie. Cet écart entre la communication officielle et la réalité du terrain est d'autant plus embarrassant que le pouvoir actuel a fait de la politique de recrutement sa marque de fabrique, pour se distinguer de la précédente majorité, qui avait, pour sa part, décrété et assumé une politique de déflation des effectifs de sécurité au nom de la rigueur budgétaire.
Les raisons de cette contre-performance sous Valls et Cazeneuve? Les départs à la retraite, très importants chaque année, seraient difficiles à compenser, assure le député Républicain d'Eure-et-Loir, Olivier Marleix, qui suit ce dossier à l'Assemblée. Le plus inquiétant est que plus les années passent, plus l'écart entre ce qui est annoncé et réalisé est important.
Le député Marleix concède toutefois que depuis les attentats Beauvau semble s'être ressaisi. Cet élu avait eu droit aux railleries de Bernard Cazeneuve, le 5 novembre dernier, quand, à l'Assemblée, il l'avait interrogé sur ces écarts étranges dans les effectifs. Huit jours plus tard, les attaques de Paris rendaient ses critiques plus audibles. Sincère ou pas, le gouvernement n'a plus qu'une loi de finances pour tenir ses engagements. Le manque en effectifs se solde, pour l'heure, en milliers d'emplois.