À chaque fois que vous allez chez votre médecin, à la pharmacie ou à l'hôpital, toutes les informations vous concernant sont enregistrées et stockées au sein du Sniiram(Système national d'information inter-régimes de l'Assurance-maladie). Cette base de données voit transiter chaque année 1,2 milliard de feuilles de soins, 500 millions d'actes médicaux et 11 millions de séjours hospitaliers.
Jusque-là, si l'accès aux données personnelles était partiellement ouvert aux organismes de recherche publique, un arrêté du ministère de la Santé basé sur une loi de 2013 en interdisait l'accès aux organismes à but lucratif (compagnie d'assurances, laboratoire pharmaceutique…). Mais le 20 mai, le Conseil d'État a demandé son annulation sous quatre mois au ministère de la Santé. Cette décision intervient précisément au moment où une nouvelle loi santé, qui prévoit un accès très contrôlé à ces données, est en train d'être mise en place.
À quoi pourraient bien servir ces données à caractère personnel ? Evaluation des politiques de santé, amélioration de l'offre de soin, étude des maladies et de l'efficacité des traitements… En 2013, la base de données du Sniiram a permis d'étudier le risque d'AVC et d'infarctus du myocarde chez les femmes sous pilules de 3e génération. L'analyse des données de plus de 4 millions de femmes a notamment permis d'identifier que le risque d'embolie pulmonaire était deux fois supérieur chez les femmes sous pilule de 3e génération que chez celles sous 2e génération.
L'exploitation des données du SNIRAM pourrait permettre de faire ressortir des signaux faibles liés aux effets secondaires des médicaments, mais encore faut-il que ces données soient utilisées et laissées à l'utilisation de personnes morales accréditées et responsables.
Dans le cas contraire, le risque de ré-identification avec les technologies de traitement des méga-données est avéré, et avec lui les conséquences discriminantes qui pourraient être le fruit de segmentations pratiquées par des organismes a but lucratif.
Ceci ne sera qu'une entrée en bouche, puisque la prise de participation de ces mêmes organismes (déjà en route aux Etats-Unis) dans la chaîne de soin, pourrait évidemment à l'avenir avoir pour conséquence un profilage des traitements proposés en fonction des segments établis.
Il ne fait nul doute pour certains segments, compte-tenus d'hypothèses économiques savamment calculées, que le pire soit à craindre...