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23 décembre 2017 21:54

Les élections régionales qui ont eu lieu jeudi 21 décembre en Catalogne ont redonné une majorité absolue au bloc des forces indépendantistes.

Cette majorité absolue, ce bloc la détenait depuis les élections de 2015 qui s'étaient jouées sur la question du référendum que les indépendantistes ont organisé le 1er octobre et qui a été refusé par le pouvoir madrilène. Ce dernier avait alors dissous le Parlement catalan. Ces élections signent donc une cinglante défaite pour le Premier-ministre espagnol, M. Mariano Rajoy et son parti, le PP. Ces derniers s'étaient distingués par une politique particulièrement intransigeante par rapport aux forces indépendantistes catalanes, et par une répression particulièrement brutale, notamment lors de la consultation du 1er octobre.

Ce vote est aussi un triomphe personnel pour Carles Puigdemont, le dirigeant indépendantiste de centre-droit, qui présidait l'ancien Parlement et qui a dû s'exiler à Bruxelles, où il réside actuellement. Mais, ce vote ne met pas fin à la crise. Au contraire; il la démultiplie et il pose ouvertement le problème du Pouvoir en Espagne.

Le résultat des urnes

Le vote du jeudi 21 décembre a donc donné une majorité absolue aux forces indépendantistes avec 70 sièges, mais la structure de ce vote est riche d'enseignements. Les forces indépendantistes disposaient de 72 sièges au Parlement élu en 2015. La liste emmenée par Puigdemont obtient 34 sièges, celle des indépendantistes « républicain » de centre-gauche de l'ERC obtient 32 sièges et le petit-parti indépendantiste d'extrême gauche, la CUP, en obtient quant à lui 4. Il faut noter qu'aux élections de 2015 le centre-droit et le centre-gauche, qui étaient alliés, avaient remportés 62 sièges. Le résultat de ce jeudi montre que, se présentant chacun sous sa bannière, ces partis accroissent le nombre de leurs sièges (66 au total). Par contre la CUP passe de 10 à 4 sièges, et subi une défaite importante. Néanmoins, ces 70 sièges assurent la prééminence du bloc indépendantiste au sein d'une assemblée composée de 135 membres.

Dans le camp de ceux que l'on appelle désormais les « unionistes », l'effondrement du parti de Mariano Rajoy, l'actuel Premier-ministre, est spectaculaire. Le PP ne remporte que 4 sièges. Il en avait 11 dans le précédent Parlement. Il y a bien eu un désaveu de la politique personnelle de Rajoy. Une partie du vote « PP » semble s'être reporté sur les libéraux de Ciudadanos qui, avec 36 votes, sont le parti qui a le plus bénéficié de ces élections, par rapport aux précédentes élections où il n'en avait eu que 25. Mais, si l'on compte un transfert du PP, cette « victoire » de Ciudadanos pâlit notablement. En fait, l'alliance Ciudadanos + PP avait 36 sièges en 2015 et 40 aujourd'hui. Le Parti Socialiste de Catalogne se maintient et passe de 16 à 17 sièges. Mais, même en additionnant les voix du PP et de Ciudadanos, ainsi que celles du Parti Socialiste de Catalogne, la coalition des « unionistes » ne remporte que 57 sièges. Elle est clairement battue.

 

Le résultat de la branche locale de PODEMOS, avec 8 sièges, est intéressant. Ce parti comptait 10 députés dans la précédente assemblée. Il semble que son discours, critiquant tout autant ce qu'il appelle l'irresponsabilité des dirigeants indépendantistes que le caractère néo-franquiste du gouvernement de Madrid et la répression qu'il avait impulsée, soit resté largement inaudible. La reprise en mains de PODEMOS-Catalogne par PODEMOS-Madrid a aussi pu laisser des traces. Fondamentalement, ce parti n'a pas compris que dans le contexte créé par la dynamique d'affrontement entre Madrid et Barcelone, une position de neutralité n'était pas tenable. Une lecture plus attentive des textes d'Otto Bauer sur la question des Nationalités aurait peut-être pu permettre à cette formation de ne pas rester dans l'imprécision de ses positions.

Quelle issue à la crise?

On constate donc une forme de radicalisation de l'opinion en Catalogne, radicalisation qui a profité tant à Ciudadanos. Cette formation a bien entendu aussi profité aussi du discrédit frappant le PP et son chef, qu'à l'alliance électorale de Puigdemont. Cela correspond bien au processus brutal, fait de fin de non-recevoir et de répression, engagé par le gouvernement de Madrid et Mariano Rajoy. Rappelons que ces derniers ont refusé de ré-ouvrir des négociations après l'annulation du statut d'autonomie de la Catalogne en 2010; ils ont systématiquement refusé d'entendre les plaintes de Barcelone, et portent ainsi la responsabilité principale de la radicalisation de l'opinion catalane où, au début des années 2000, les indépendantistes représentaient seulement 15% de la population.

Fondamentalement, le compromis constitutionnel qui avait permis à l'Espagne de sortir du Franquisme et de commencer son processus de démocratisation est en panne. C'est là l'une des leçons les plus importantes de cette crise. Ce processus ne peut plus servir de base à l'ouverture de nouvelles négociations, et en tous les cas certainement pas tant que Mariano Rajoy restera à la tête d'un gouvernement, minoritaire qui plus est, discrédité par l'emploi de la répression. Déconsidéré par l'échec de sa politique de force à l'égard de la Catalogne, Mariano Rajoy doit donc partir et permettre à des élections générales d'avoir lieu en Espagne. Il doit partir pour que la paix des esprits revienne. Il doit partir aussi dans le cadre d'une amnistie générale permettant aux dirigeants catalans emprisonnés et exilés de revenir dans le jeu politique.

 

Le gouvernement qui serait issu de ces élections pourrait reprendre les négociations et, simultanément, convoquer une conférence constitutionnelle chargée de reprendre le dossier de la démocratisation inachevée de l'Espagne. La conclusion de ce processus serait alors, logiquement, un référendum proposant aux catalans diverses solutions, allant du statuquo actuel à un nouveau statut d'autonomie et à l'indépendance.

Cette solution est la seule qui permette de combiner à la fois l'aspiration à la souveraineté dans la société catalane, la démocratie, mais aussi la paix civile. Car, l'une des plus tragiques erreurs de Mariano Rajoy fut d'avoir conduit une politique qui a largement contribué à rouvrir les anciennes blessures de la Guerre Civile. C'est un point toujours sensible dans la société espagnole en général et dans la société catalane en particulier. C'est pourquoi il ne peut plus aujourd'hui incarner le pouvoir espagnol et pourquoi il n'a plus de légitimité en Catalogne ni en Espagne. Et, un pouvoir sans légitimité qui cherche à mobiliser la seule légalité se transforme rapidement en Tyrannie.

 

Chaque jour qui passe où il cherchera à se maintenir au pouvoir sera un jour qui rapprochera un peu plus l'Espagne et la Catalogne du gouffre. Car, si le mouvement indépendantiste catalan a été pacifique jusqu'à présent il serait fort présomptueux de présumer qu'il puisse le rester éternellement.

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