«Concernant les infirmiers, on est en moyenne annuelle à 15 agressions par jour.»
Ce chiffre désolant, c'est Thierry Amouroux, porte-parole du syndicat national des professionnels infirmiers qui le donne à Sputnik France. À en croire les chiffres du dernier rapport de l'Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS), 446 établissements ont déclaré 22.048 signalements de violences en 2017. Depuis 2005, l'ONVS recueille, sur la base du volontariat, les signalements de faits de violence commis en milieu de santé. Les dernières données montrent une hausse des signalements de 25,3% pour une augmentation d'établissements déclarants de 23,9%. C'est la plus forte augmentation depuis 2012.
Et le tableau serait en réalité bien plus noir. Seuls 7,71% des établissements de santé ont signalé des violences l'année dernière.
«Certains ont envie de passer pour bons élèves et évitent les déclarations. Je pense que le problème est bien plus grave que ce que laisse transparaître l'ONVS», souligne Thierry Amouroux.
Quand on regarde les chiffres dans les détails, on s'aperçoit que 49% des violences déclarées concernaient des agressions physiques. Dans seuls 40% des cas, les faits en sont restés aux insultes, injures et menaces.

Il y a à la fois une augmentation en nombres et en gravité. On est passé des insultes aux agressions physiques: des coups de poing, de pied, des morsures, des gifles, des jets de projectiles», s'alarme le syndicaliste.
«Les incivilités, les insultes, c'est tous les jours. Et cela peut aller jusqu'au contact physique, au moins deux à trois par mois […] On a clairement une forte augmentation d'événements depuis 10 ans», confiait récemment une responsable d'un établissement de santé de l'Oise à nos confrères du Parisien.
Sans surprise, ce sont les services de psychiatrie qui sont les plus touchés par les violences. Mais ce qui inquiète particulièrement les professionnels, c'est l'augmentation des agressions aux urgences. Elles concentrent à elles seules 16% des signalements, en augmentation de 3% par rapport à 2016.

Thierry Amouroux met en cause les réductions budgétaires:
«Là où vous aviez quatre services d'urgence dans un département, maintenant vous n'en avez plus qu'un. Cette réduction entraîne une multiplication des heures d'attente et les gens sont de plus en plus sur les nerfs. Le problème des sous-effectifs nous met sous pression. Nous avons moins de temps à consacrer à l'écoute des patients afin de désamorcer les tensions.»
Mis au régime sec depuis des années, les hôpitaux tirent la sonnette d'alarme. En janvier dernier, mille professionnels du secteur de la santé ont signé une tribune dans Libération afin de dénoncer la nouvelle cure d'austérité avec laquelle ils doivent composer.
En 2018, ce ne sont pas moins de 1,6 milliard d'euros d'économies qu'il faut réaliser. Le budget des hôpitaux n'augmentera que de 2%. C'est moitié moins que leurs charges.
«Ce "toujours plus avec toujours moins" entraîne une dégradation des conditions de travail, provoquant épuisement et démotivation des soignants et en conséquence, une baisse de la qualité des soins», notaient alors les professionnels dans le quotidien.