Par Ludovic Delory.
Voici que refait surface l’idée d’une taxe sur la viande, poussée par une étude affirmant qu’elle pourrait éviter 220 000 morts par an. Marco Springmann, de l’université d’Oxford, estime que manger de la viande rouge induit des coûts intenables en soins de santé, coûts supportés par la collectivité. Le chercheur s’empresse néanmoins d’ajouter :
Personne ne veut que les gouvernements disent aux gens ce qu’ils doivent et ne doivent pas manger.
Mais… Imposer une taxe sur un produit vise, dans l’esprit des experts, à diminuer sa consommation. Même si l’efficacité des taxes comportementales laisse à désirer quel que soit le produit imposé (qu’on pense au flop des accises sur l’alcool, augmentées par le gouvernement belge), l’idée trotte chaque jour davantage dans l’esprit des décideurs. Quitte à développer le marché parallèle ou à faire baisser la qualité par le jeu fort compréhensible de l’offre et de la demande. Et au détriment de la santé des consommateurs.
Une mécanique bien rodée
Cela fait plusieurs années que la viande est dans le collimateur des gouvernements. Un bien facilement taxable, dont la consommation est en constante augmentation, constitue en effet une cible de choix pour accroître les revenus des États.
Mais comme la mesure est impopulaire, il fallait d’autres arguments pour la justifier. C’est ici qu’interviennent les associations militantes. Provéganes, antispécistes, amies de la planète… À coup d’études culpabilisantes, elles parviennent à infléchir une grande partie de l’opinion publique. Leurs actions violentes (contre les boucheries, notamment) font les délices des médias.
Mais elles pèsent aussi de plus en plus financièrement et politiquement, à l’image de FAIRR (Farm Animal Investment Risk and Return), groupe soutenu par de puissants investisseurs. En outre, un peu partout dans le monde, des militants de la cause animale se font élire pour peser sur le débat public. L’idée d’une taxe sur la viande fait son chemin en Suède, au Danemark et en Allemagne. Le principal argument invoqué est la protection de la planète — de ses sols et de ses forêts.
Le malthusianisme appliqué aux bovins
Comme à chaque fois qu’elle est polluée par le débat politique, la science sort perdante. L’homme est un omnivore. Tenter de le priver de ressources indispensables à sa santé, au nom d’une idéologie ou d’intérêts financiers, prend des allures de comportement criminel.
Que dit la médecine ? L’intuition du cardiologue Blake Donaldson, en 1919, a été validée par la recherche moderne. Gary Taubes l’écrit dans son best-seller Fat, pourquoi on grossit (2011) :
Nos gènes ont bel et bien été façonnés par les 2,5 millions d’années au cours desquelles nos ancêtres ont vécu comme chasseurs-cueilleurs avant l’avènement de l’agriculture il y a de cela 12 000 ans seulement.
Une étude1 menée sur 229 populations de chasseurs-cueilleurs conclut que les graisses animales (viande, poisson, volaille) constituaient l’essentiel de l’alimentation de nos ancêtres du paléolithique. Les « aliment de base d’un régime sain », ajoute Taubes.
Il n’existe à l’heure actuelle aucun substitut valable aux protéines animales, essentielles à notre corps. Diminuer — par une taxe ou par un génocide bovin — la consommation de ces protéines, c’est se priver à terme de lait infantile. Et donc de l’Humanité.
Des milliers de sportifs de haut niveau se nourrissent aujourd’hui de protéines animales et de graisses saturées. Taxer la viande, c’est en freiner l’accès aux populations les plus défavorisées, qui ont justement besoin de s’alimenter plus sainement. Cette mesure irait à l’encontre des intérêts de la vaste majorité de la population mondiale. Celle qui continue à se développer.
Sur Twitter, la Secrétaire britannique au Trésor a rejeté d’une main cette proposition de taxe, en la qualifiant de « connerie » (claptrap) et en ajoutant que le bacon contribuait à son bien-être :
En 2013, Vincent Bénard se fendait d’un poisson d’avril dystopique sur Contrepoints, dans lequel les Français auraient à financer une « carte viande » pour se dédouaner de leur consommation carnée excessive.
Il semble que les temps soient mûrs pour donner vie à ce projet liberticide.