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david MIEGE
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1 février 2019 21:42

Deux choses ressortent du coup d’État étasunien au Venezuela. D’abord, il est inhabituellement public. Généralement, les États-Unis tentent de dissimuler leurs coups d’État. Ensuite, celui-ci est basé sur une série de mensonges flagrants, et pourtant, les représentants du système bipartisan à Washington, à quelques exceptions près, continuent de les répéter.

Nous commencerons par corriger les mensonges pour que les lecteurs partent des mêmes faits. Deuxièmement, nous décrirons comment ce coup d’État a perdu. Il sera un nouvel embarras pour l’administration Trump et la politique étrangère étasunienne.

Il est important de comprendre que le Venezuela est devenu un conflit géopolitique puisque la Russie et la Chine sont ses étroits alliés. La Chine et la Russie qui pénètrent l’arrière-cour des États-Unis remettent en question la désuète Doctrine Monroe.

Le Venezuela possède les plus grandes réserves de pétrole au monde et les deuxièmes plus grandes réserves d’or, ainsi que des diamants et d’autres minéraux comme le coltan (nécessaire pour les appareils électroniques). De plus, le Venezuela aura la présidence de l’OPEP et sera en position de faire pression pour que le paiement du pétrole se fasse en monnaies autres que le dollar ou en cryptomonnaies, une menace majeure pour le dollar US.

Corriger le récit

De nombreuses déclarations répétées par les fonctionnaires de Washington DC et les médias grand public et destinées à justifier le coup d’État sont si évidemment fausses qu’il est difficile de croire qu’elles ne sont pas intentionnelles. Dans son commentaire de deux paragraphes sur le coup d’État, même le sénateur Bernie Sanders les a répétées.

1ère vérité : Nicolás Maduro est le président légitime.

Le président Maduro a été réélu le 20 mai 2018 en réponse à la demande de l’opposition de tenir des élections anticipées. La légitimité de l’élection de Maduro est si évidente qu’il faut supposer que ceux qui affirment qu’il est illégitime disent intentionnellement le faux ou sont ignorants.  L’élection a été fixée conformément à la Constitution du Venezuela et après consultation des partis d’opposition. Lorsqu’il est devenu évident que l’opposition ne pourrait l’emporter, elle a décidé, sous la pression des États-Unis, de boycotter l’élection afin de ruiner sa légitimité. Les faits sont que 9 389 056 personnes ont voté, soit 46% des électeurs. Seize partis ont participé, six candidats se sont présentés à la présidence.

Le processus électoral a été suivi par plus de 150 observateurs. Cela comprenait, entre autres, 14 commissions électorales de huit pays, dont le Conseil des experts électoraux d’Amérique latine, deux missions techniques électorales et 18 journalistes de différentes parties du monde. Selon les observateurs internationaux, « les élections ont été très transparentes et conformes aux normes internationales et à la législation nationale ».

Le Venezuela a l’un des meilleurs systèmes électoraux au monde. La fraude n’est pas possible car l’identification et les empreintes digitales sont requises pour chaque électeur. Les machines à voter sont vérifiées avant l’élection et immédiatement après. Le Venezuela fait quelque chose qu’aucun pays au monde ne fait – l’audit public et citoyen d’un échantillon de 53% des machines à voter, qui est télévisé. Les 18 partis ont tous signé les vérifications.

Maduro l’a emporté à une large majorité, obtenant 6 248 864 suffrages, soit 67.84% des votants; il était suivi par Henri Falcón avec 1 927 958 voix, 20.93%, Javier Bertucci avec 1 015 895 voix, 10.82%, et Reinaldo Quijada, qui a obtenu 36 246 votes, 0.39% du total.

Ce même système de vote a été utilisé dans des élections que le parti de Maduro a perdues, les élections législatives et des gouverneurs. Le Venezuela est une véritable démocratie avec des élections transparentes. Les États-Unis pourraient en apprendre long du Venezuela sur ce qu’est une vraie démocratie.

2e vérité : La crise économique est causée par l’intervention extérieure, le sabotage intérieur et la baisse des prix du pétrole.

Il est indubitable que la situation économique au Venezuela est désastreuse. La cause en est la guerre économique menée par les États-Unis, la baisse importante des prix du pétrole et le sabotage économique de l’opposition. Fondamentalement, les États-Unis et l’opposition ont créé des problèmes dans l’économie vénézuélienne et ils disent maintenant que Maduro doit être remplacé en raison des problèmes qu’il a créés.

Le pétrole a été découvert au Venezuela au début du XXe siècle et a dominé l’économie depuis lors. Le Mal hollandais, l’influence négative d’une économie fondée sur une seule ressource naturelle, provoque un afflux de devises étrangères qui rend les prix des autres produits du pays moins concurrentiels. Il est meilleur marché d’importer des produits que de les fabriquer. Il devient plus difficile pour des secteurs comme l’agriculture et l’industrie manufacturière de se développer.

Chavez/Maduro ont cherché à diversifier l’économie. Ils ont mis en place des milliers de communeset des centaines de milliers de gens travaillant dans des coopératives pour construire l’agriculture et l’industrie. Lorsque le prix mondial du pétrole a été divisé par plus de la moitié, les finances publiques du Venezuela se sont effondrées, ruinant ces efforts. La guerre économique menée par les États-Unis a rendu difficile au Venezuela d’emprunter et de commercer avec certains pays.

Les sanctions économiques contre le Venezuela ont commencé sous le président Obama et l’administration Trump les a renforcées par des sanctions financières. Les sanctions des États-Unis coûtent au Venezuela quelque 6 milliards de dollars depuis août 2017, selon une analyse datant d’octobre. Des mesures contre l’industrie pétrolière du pays ont interdit à la compagnie vénézuélienne à majorité publique CITGO de renvoyer les bénéfices au Venezuela, provoquant 1 milliard de pertes par année pour le gouvernement. Aujourd’hui, la Banque d’Angleterre refuse de restituer 1,2 milliards de dollars en réserves d’or après que des responsables nord-américains, dont le secrétaire d’État Michael Pompeo et le conseiller à la Sécurité nationale John Bolton, ont fait pression sur elle pour que le Venezuela soit coupé de ses actifs à l’étranger.

La guerre économique des États-Unis et le sabotage de l’économie par des intérêts commerciaux ont été révélés dans le cadre des efforts pour chasser Maduro en provoquant des troubles sociaux et un manque de confiance dans le gouvernement. Ces efforts ont inclus le stockage de biens de première nécessité dans des entrepôts et la vente des produits vénézuéliens à la Colombie.

En septembre 2018, le Venezuela a signalé une campagne mensongère exagérant l’émigration du Venezuela. Le gouvernement a publié des statistiques du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés pour affirmer que le Venezuela a le plus petit nombre d’émigrants volontaires du continent. Il a souligné que 5.6 millions de Colombiens avaient fui la violence dans le pays pour vivre au Venezuela. Celui-ci a des programmes qui ont aidé des milliers de Vénézuéliens à retourner chez eux.

Le socialisme renforce les économies, comme l’a démontré le cas du Portugal. En effet, une critique adressée au Venezuela est que le processus bolivarien avance trop lentement pour instaurer une économie socialiste. Davantage de secteurs doivent être nationalisés et placés sous le contrôle démocratique du peuple.

3e vérité : C’est l’opposition qui est violente, pas le gouvernement de Maduro

Les manifestants de l’opposition ont été extrêmement violents. Une des tactiques de l’opposition était d’user de la violence puis de filmer la réponse du gouvernement pour le faire paraître violent. Lorsque Abby Martin a été confrontée à des manifestants de l’opposition, ils lui ont dit : « Ne filmez rien de ce que nous faisons. Filmez seulement ce que le gouvernement nous fait. » Elle rapporté sur la violence en disant : « la plus grande partie a été causée par la violence directe ou indirecte de l’opposition ».

Abby Martin rapporte que l’opposition a attaqué des hôpitaux, incendié le ministère du Logement, assassiné des chavistes et attaqué des communes citoyennes telles qu’une commune artistique qui dispensait gratuitement des cours de danse et de musique aux enfants du quartier. Des Afro-Vénézuéliens ont été brûlés vifs. Des manifestants ont sorti des chauffeurs de bus de leur véhicule et y ont mis le feu. Lorsque des photos et des vidéos des violences de l’opposition ont été publiées sur les réseaux sociaux, Abby Martin et son collègue, Mike Prysner, sont devenus la cible d’une campagne médiatique mensongère sur ces mêmes réseaux sociaux. L’opposition a fait tout ce qu’elle pouvait pour les empêcher de rapporter la vérité en recourant à des centaines de menaces de mort et de lynchage.

En 2017, Venezuela Analysis a rapporté que l’opposition violente comprenait une attaque de la maternité mettant en danger la vie de plus de 50 nouveau-nés. Un autre rapport a décrit l’opposition utilisant des tireurs d’élite pour abattre des fonctionnaires du gouvernement et des civils. Les journaux de l’opposition ont exhorté à l’utilisation d’objets contondants pour « neutraliser » les manifestants pro-gouvernement, entraînant de graves blessures et la mort.

Steve Ellner a également rapporté que la violence venait de l’opposition. Il a signalé des attaques contre des épiceries, des banques, des bus et des bâtiments gouvernementaux. D’autres commentateurs ont décrit des incidents de violence spécifiques de l’opposition, y compris le meurtre de personnes. Maduro a ordonné l’arrestation d’un général à la retraite qui twittait comment utiliser le fil de fer pour décapiter des motocyclistes, ce qui s’est produit, et comment attaquer les véhicules blindés au cocktail Molotov.

Des documents montrent que la violence était la stratégie de l’opposition. Elle a cherché à « créer des situations de crise dans les rues qui faciliteront l’intervention étasunienne, ainsi que des forces de l’OTAN avec le soutien du gouvernement colombien. Chaque fois que c’est possible, la violence doit provoquer des morts ou des blessés ».

Les récits de la violence du gouvernement sont truffés de mensonges. La réponse du gouvernement a été l’appel de Maduro à une conférence de paix, qu’il décrivait comme « une conférence nationale de paix avec tous les secteurs politiques du pays […] pour que nous, les Vénézuéliens, puissions essayer de neutraliser les groupes violents ».

4e vérité : l’Assemblée nationale a agi en violation de la loi et est coupable d’outrage à la Cour

L’Assemblée nationale n’est pas le seul organe démocratique au Venezuela. En effet, depuis que l’opposition a remporté une majorité, elle a agi en violant la loi et en protégeant la violence de l’opposition par le biais d’une loi d’amnistie embarrassante.

Le 6 décembre 2015, l’opposition a gagné une majorité parlementaire à l’Assemblée. Il y a eu des accusations d’achat de votes dans l’État d’Amazonas qui ont fait l’objet d’une enquête du Conseil électoral national, une autre branche du gouvernement. La Cour suprême a interdit à quatre députés de l’Amazonas d’entrer en fonction, deux de l’opposition, un allié de l’opposition et un du parti au pouvoir. L’Assemblée nationale a permis à trois candidats d’entrer en fonction. L’Assemblée a été reconnue coupable d’outrage à la Cour depuis juillet 2016 et ses décisions ont été annulées.

Avant la décision de la Cour, l’Assemblée a adopté une étonnante loi d’amnistie, qui accordait l’amnistie pour les crimes commis par l’opposition depuis 1999 (l’élection de Chavez). La loi est un aveu de culpabilité et fournit un catalogue bien organisé de crimes, incluant les félonies, les crimes commis lors d’assemblées publiques, des actes terroristes impliquant des explosifs et des armes à feu et l’affaiblissement de l’économie. Ils admettent au fond exactement ce que Chavez/Maduro ont affirmé — des crimes pour renverser le gouvernement depuis 17 ans. La Cour suprême du Venezuela a jugé la loi d’amnistie anticonstitutionnelle. C’est à tort que l’administration Trump qualifie l’Assemblée de seule institution démocratique du Venezuela.

En janvier dernier, une filiale de la compagnie pétrolière publique a demandé à l’Assemblée d’intervenir, affirmant que le président ne peut promouvoir des réformes dans des entreprises pétrolières publiques-privées sans l’approbation préalable de l’Assemblée nationale. Le 16 janvier, le tribunal a jugé que l’Assemblée était toujours coupable d’outrage à la Cour et qu’elle ne pouvait pas agir. C’est également à ce moment-là que l’Assemblée a élu à sa présidence Juan Guaidó, qui s’autoproclamerait président du Venezuela dans le cadre du coup d’État dirigé par les États-Unis. L’élection de Guaidó à la tête de l’organe législatif était illégale et a été annulée par la Cour.

L’Assemblée existe toujours mais continue à mépriser les magistrats. Elle peut rectifier cette situation en renvoyant les députés accusés de fraude électorale. Elle refuse de le faire car son but est de démettre Maduro de ses fonctions et il faut une super majorité pour le faire.

Medea Benjamin de CODE PINK interrompt Mike Pompeo à la réunion de l’OEA. Press TV.

Chronologie du coup d’État au Venezuela

Dans l’article « Anti-Maduro Coalition Grew from Secret Talks », [La coalition anti-Maduro est née dans des discussions secrètes], Associated Press explique que le coup d’État n’a été « possible qu’à cause du fort soutien de l’administration Trump, elle a dirigé un chœur des gouvernements majoritairement conservateurs d’Amérique latine, qui ont immédiatement reconnu Guaidó ».

Depuis août 2017, Donald Trump dit qu’une intervention militaire contre le Venezuela était une possibilité. AP décrit cela comme un « moment décisif » dans la planification du coup d’État. Elle rapporte que Trump fait pression sur les alliés et les pays latino-américains pour envahir le Venezuela. En septembre, le New York Times a rapporté que l’administration Trump a rencontré les fomenteurs du coup d’État depuis la mi-2017.

Le Wall Street Journal rapporte que Trump a longtemps considéré le Venezuela comme l’une de ses trois principales priorités, avec l’Iran et la Corée du Nord. Trump a demandé une séance d’information sur le Venezuela le lendemain de son entrée en fonction, parlant de l’immense potentiel de ce pays pour devenir une riche nation grâce à ses réserves de pétrole. AP rapporte que Trump a « personnellement provoqué » ce coup en parlant de changement de régime au Venezuela lors de chacune de ses rencontres avec des dirigeants latino-américains.

Après la réélection de Maduro, les plans de l’administration ont commencé à prendre forme, dirigés en partie par des membres importants du Conseil national de sécurité et par des militants anti-Maduro au Congrès, tels que le sénateur Marco Rubio, un interventionniste extrêmiste.

Le 1er novembre, John Bolton s’est concentré sur l’Amérique latine, qualifiant Cuba, le Nicaragua et le Venezuela de « troïka de la tyrannie ». Le 2 janvier, il a rencontré ses homologues brésilien et colombien en vue de collaborer pour « rendre au Venezuela son héritage démocratique ».

Le 10 janvier, Maduro a prêté serment pour son second mandat, Pompeo a discuté avec le chef de l’opposition, Guaidó, promettant son soutien. Le Canada a également joué un rôle important, AP rapporte que la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland a parlé à Guaidó le soir précédant l’investiture de Maduro, offrant le soutien du Canada. C’était 13 jours avant que Guaidó annonce qu’il était président du Venezuela.

Le 12 janvier, le département d’État a soutenu la décision de Guaidó d’invoquer son autorité en tant que président de l’Assemblée, disant : « Il est temps d’entamer la transition ordonnée vers un nouveau gouvernement ». Le 15 janvier, l’Assemblée nationale a déclaré Maduro illégitime. L’administration Trump a œuvré pour gagner des alliés alignés sur le soutien à Guaidó. Le 18 janvier, le ministre vénézuélien des Affaires étrangères a décrit un coup d’État nord-américain en cours.

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