Déroulement
L’auteur des attaques, Radouane Lakdim, est un Marocain naturalisé français en 2004, âgé de 25 ans et demeurant avec sa famille à la cité Ozanam de Carcassonne. Dans la matinée du , à 10 h 13 au parking des Aigles de la Cité à Carcassonne,
il vole une voiture Opel Corsa, tuant le passager, Jean Mazières, 60 ans, un vigneron à la retraite, et blessant très grièvement par un tir dans la tête le conducteur, Renato Silva, un jeune portugais de 25 ans, qu’il jette hors du véhicule. Il dit s’être attaqué à eux car il a pensé qu’ils étaient homosexuels .
Il patiente à proximité de la caserne de Laperrine du 3e régiment de parachutistes d’infanterie de marine(3e RPIMa), dans le but de s’en prendre à des militaires mais, n’en voyant pas, il se rabat sur un groupe de quatre CRS de la compagnie 53 qui terminent leur footing, avenue du Général-Leclerc et rentrent à la caserne. Il tire à six reprises et blesse grièvement l’un d’entre eux, originaire de Marseille et âgé de 43 ans.
À 10 h 38, Lakdim gare l’Opel Corsa qu’il a dérobée sur le parking du supermarché Super U, situé rond-point de l’Europe à Trèbes, à 8 km du lieu du premier meurtre. Seulement 26 secondes après être entré dans le magasin, il tire par deux fois (le premier coup ne part pas) et tue à bout portant le chef boucher âgé de 50 ans Christian Medvès, qui était parti discuter avec une caissière.
Sauf deux, les clients s’enfuient. Hervé Sosna, âgé de 65 ans est lui aussi tué d’une balle à bout portant dans la tête. Une vingtaine de personnes parviennent à s’échapper, d’autres à se cacher dans la chambre froide du supermarché.
Le terroriste lance dans le magasin une grenade, qui n’explosera pas, et se retranche dans la salle des coffres où s’était cachée l’hôtesse d’accueil du magasin, qui se trouve prise en otage Julie V., ancienne ingénieure de 40 ans devenue caissière l’année passée après la perte de son précédent emploi.
Elle parvient à engager un dialogue pour l’apaiser et sur son injonction, elle appelle le commissariat où le terroriste dit être membre de l’EI et exiger la libération de Salah Abdeslam. L’antenne du GIGN installée à Toulouse est alertée à 10 h 56 et demande l’assistance du groupe national dès 10 h 58 et 24 hommes décolleront à 12 h de la base aérienne de Villacoublay.
À 11 h 21, un groupe de gendarmes du PSIG de Carcassonne pénètre dans le magasin en compagnie du lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, plus haut gradé sur place. Rapidement et malgré les mises en garde des agents du PSIG qui disposent eux de gilets pare-balle, il se propose comme otage en échange de la libération de l’hôtesse de caisse.
À 11 h 32, l’otage est libérée. Le PSIG évacue les derniers clients restés dans le magasin. Le GIGN de Toulouse est sur place dès 12 h 25 et ils sont rejoints par le RAID et la BRI. Vingt minutes plus tard, Arnaud Beltrame joint le commandant du groupement et répète les revendications de Lakdim.
Arnaud Beltrame apparaît une nouvelle fois comme bouclier humain quand la porte s’ouvre à 13 h 10. À 13 h 30, le terroriste est entendu prier. Plus tard, il exige un chargeur de téléphone portable qui lui est remis. À 14 h 13, un contact est noué sur le téléphone portable du gendarme et un négociateur du GIGN basé en région parisienne.
Lakdim réitère sa demande de libération de Salah Abdeslam, mais le négociateur lui répond qu’il n’en a pas le pouvoir. Une minute plus tard, il signale la présence de la mère de Lakdim. Beltrame crie : « Attaque ! Assaut ! Assaut ! ». Alors que le terroriste est en train de trancher la gorge et de cribler de balles le corps du gendarme, le GIGN ne semble pas comprendre de suite la scène ni interpréter les râles entendus.
L’équipe parisienne n’étant pas encore installée, c’est l’antenne du GIGN de Toulouse qui donne l’assaut à 14 h 24 min 30 s, soit 8 minutes 30 après les cris d’Arnaud Beltrame. Les hommes du GIGN entrent dans la salle des coffres alors que le terroriste, dos à la porte, tente de se relever et crie « allahu akbar » avant d’être abattu. L’assaut est terminé à 14 h 28.
Cinq personnes sont grièvement blessées, dont le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame. Cet acte de bravoure de l’officier est salué par le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb. Deux gendarmes du GIGN ont été blessés par le terroriste lors de l’assaut.
Arnaud Beltrame succombe à ses blessures à l’hôpital dans la nuit du 23 au . L’autopsie révèle que les lésions par balles étaient non létales. La mort est due à « une plaie gravissime de la trachée et du larynx par arme blanche ». Outre son pistolet, un couteau de chasse et des engins explosifs artisanaux sont retrouvés dans le supermarché.
Il est annoncé plus tard que le nombre de blessés s’élève à seize. Quelques minutes après l’assaut, l’État islamique revendique, via son organe de propagande Amaq, les trois attaques du « soldat » et visait à travers cet acte les pays membres de la coalition internationale.
Le Système d’alerte et d’information des populations (SAIP) n’a pas émis d’alerte durant cette attaque. En mai 2018, le gouvernement abandonne SAIP pour se reposer sur Google, Facebook et Twitter. Pendant l’attaque de Trèbes, le dispositif de contrôle d’absence de danger Facebook (Facebook Safety Check) a été activé.
Qui sont les victimes?
● Jean Mazières
Jean Mazières a été la première victime du tueur. Viticulteur à la retraite, il était âgé de 61 ans et résidait dans le petit village de Villedubert. Il a croisé la route de Radouane Bakrim vers 10h15, à Carcassonne, lorsque ce dernier a volé l’Opel Corsa blanche dans laquelle il se trouvait. Jean Mazières a été tué. Quant au conducteur du véhicule, son pronostic vital était toujours engagé samedi soir.
● Christian Medves
Connu de tous à Trèbes, Christian Medves était le chef du rayon boucherie du Super U. Le jeune quinquagénaire, deux fois père et une fois grand-père, est décrit par ses proches dans un article du Parisien comme un homme «qui vivait à 120% et ne faisait jamais rien à moitié», «un bon vivant extrêmement attaché à sa famille et à ses amis», «un cœur énorme, une figure, une belle personne». Il a perdu la vie sous les balles du terroriste.
● Hervé Sosna
À côté du chef boucher, se trouvait un client que le djihadiste a aussi abattu: Hervé Sosna, 65 ans, maçon à la retraite qui se rendait «dans ce magasin deux fois par semaine», a raconté son demi-frère William Durand au quotidien régional La Dépêche du Midi .
Cet habitant de Trèbes «avait de grandes capacités intellectuelles, lisait énormément, surtout des poèmes. Mais comme il n’avait jamais voulu quitter Trèbes, il s’était lancé dans le bâtiment», a témoigné William Durand, qui voyait son frère «tous les jours». «Il n’avait rien demandé et on l’a tué comme ça», s’est-il désolé.
● Arnaud Beltrame
Le nom de ce lieutenant-colonel du groupement de gendarmerie de l’Aude est désormais associé à la formule d’Emmanuel Macron: «tombé en héros». Le militaire de 45 ans a obtenu du terroriste qu’il le prenne en otage à la place de clients et employés du Super U. Blessé par balles par Radouane Lakdim, il a été secouru après l’assaut du GIGN mais a succombé à ses blessures dans la nuit de vendredi à samedi.