Le tribunal de commerce d'Angoulême a prononcé, vendredi, la liquidation judiciaire de La Manufacture Charentaise (LMC), dernière entreprise à fabriquer des charentaises, en Charente. La fermeture de l'usine est à effet immédiat et laisse 104 salariés sur le carreau.
La Charente ne fabriquera plus de charentaises ! Triste nouvelle pour les puristes des pantoufles et les amoureux de la matière réchauffante : la dernière usine traditionnelle de fabrication de charentaises, en Charente, ferme.
Le tribunal de commerce d'Angoulême a prononcé, ce vendredi, la liquidation judiciaire de La Manufacture Charentaise (LMC), basée à Rivières, ultime usine de charentaises dans le département. L'entreprise, qui résultait du regroupement, en 2018, de quatre fabricants, avait été placée en redressement judiciaire à la fin du mois de juillet. Une seule offre de reprise avait été déposée et a été refusée par le tribunal de commerce : elle ne permettait la sauvegarde que de 38 emplois. Aujourd'hui, 104 salariés sont sur le carreau.
"Quelque chose de patrimonial"
Henri Lalouette, dirigeant départemental du syndicat FO, qui suivait le dossier, a dénoncé "la gabegie, l'incompétence et la négligence" des dirigeants. Il a ensuite appelé à ce qu'un groupe ou mécène "ne laisse pas tomber ce savoir-faire. On est dans quelque chose de patrimonial."
La charentaise est née à la fin du XIXe siècle, elle est issue des rebuts de fabrication des industries textiles et papetières, situées sur le fleuve Charente. Les savetiers locaux ont eu l'idée de récupérer les feutres qui servaient au pressage pour en faire des chaussons. Les charentaises sont reconnaissables par une languette épaisse, qui protégeait le pied du sabot, et par sa technique du "cousu-retourné", où la semelle est cousue et montée à l'envers, puis retournée.
Gouvernance en conflit et "mauvais choix"
Dans une lettre ouverte, Renaud Dutreil, président et propriétaire de la moitié des parts de LMC a regretté cette "triste issue". Il a également signifié que son projet, il y a un an, était "un bon plan" et a souligné la responsabilité du directeur général, démissionnaire, qui aurait "engagé l'entreprise sur la mauvaise pente". La société aurait subi une baisse importante de son chiffre d’affaires en quelques mois, passant de 13 millions d'euros en 2018 à plus que 7 millions. Le résultat net a dégringolé de 1,3 million d'euros à une perte de 700.000 euros.
D'après cette même source, des problèmes de gouvernance ainsi que de "mauvais choix de commercialisation" - l'abandon trop rapide des ventes traditionnelles dans les grandes surfaces pour le haut de gamme - auraient précipité la descente de l'entreprise.
Un label, gage de savoir-faire
En mars dernier, LMC avait obtenu un label, garant du savoir-faire de la charentaise. Délivrée par l'Institut national de la propriété industrielle, "l'indication géographique" est gage de la qualité de la "charentaise de Charente-Périgord". Aujourd'hui, elle est également détenue par l'entreprise Fargeot, qui fabrique encore des charentaises, mais en Dordogne.
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