Un nombre croissant de croyants utilisent le réseau social pour affirmer leur foi catholique et échapper au statut de “double minorité”, en tant que jeune parmi les fidèles et en tant que catholiques au sein de la société.
Les croix, chapelets et iconographies catholiques se font de plus en plus visibles sur l’Instagram français, rapporte Le Figaro, lundi 10 février. Un réseau social dans lequel la jeune génération croyante s’est engouffrée, désirant pouvoir vivre avec son temps tout en restant connectée à sa foi, qui s’exprime facilement en images. Le christianisme est une religion en effet très iconophile. À l’heure où les catholiques pratiquants ne sont plus qu’une minorité, il s’agit pour cette communauté de se réapproprier leur religion, et de la conjuguer au XXIe siècle.
De quoi pousser certains prêtres, notamment, à revêtir la soutane, plus obligatoire depuis 1962, afin de rester « visibles » aux yeux de la société.
« Réaffirmation religieuse »
Cette tendance catho 2.0 est motivée par la volonté de ces jeunes croyants d’échapper au statut de « double minorité », du fait de leur jeune âge au sein de la communauté catholique française, et de celui de leur foi religieuse dans une société à forte tendance athéiste.
C’est ainsi que la photographe Angélique Provost, 27 ans, multiplie les clichés d’inspiration catholique sur Instagram. L’une d’elle, par exemple, qui illustre son petit-déjeuner dans des tons sépia, fait figurer un chapelet entre le café et le croissant.
D’autres la montrent à genoux en train de prier dans une église, ou se faisant bénir par un ami tout juste ordonné prêtre. Une autre dévoile son tatouage du symbole « noun », une lettre arabe désignant les chrétiens - car c'est la première lettre de la traduction arabe de Nazareth, ville d'origine de Jésus - et un scapulaire, dont l’« influenceuse catho » aux 10 000 abonnés se fait un plaisir de rappeler l’histoire et l’usage par les chrétiens.
Pour le sociologue Yann Raison du Cleuziou, interrogé par Le Figaro, on assiste là un phénomène de « réaffirmation religieuse », qu’on constate « dans l’islam, le judaïsme ou le catholicisme », de la part des jeunes générations. « Plus conservateurs, ils ont moins de mal à assumer une différence catholique que leurs aînés », poursuit-il. « Il y a encore trop ce stéréotype du catho coincé. Or, ça c’est complètement fini ! », assure Baptiste, un militaire de 27 ans dont les photos de vacances mêlent celles de sorties scoutes à celles de « messes sur la plage à la cool ».
« Pour la légende, il suffit de piocher dans les psaumes »
Il faut dire que l’iconographie catho est très « instagrammable ». « L’esthétique d’une photo se trouve facilement dans l’art religieux : vitrail, statue, église. Pour la légende, il suffit de piocher dans les psaumes ou chez les saints », explique Arthur, jeune journaliste à Rome dont les photos font régulièrement allusion à Dieu ou à la foi chrétienne. Parfois, le réseau social agit comme un véritable déclic. « Avec les comptes d’influenceurs catholiques, j’ai découvert qu’on pouvait assumer sa foi sur les réseaux sociaux. Sans eux, je n’aurai pas osé me lancer », reconnaît Ombeline, dessinatrice, qui n’hésite plus à publier ses portraits de saints sur le réseau social.
Certains ont même mêlé leur foi aux affaires. C’est le cas d’Armelle Pecqueriaux, qui propose sur son concept store Catho-Retro des objets chrétiens afin de « proclamer sa foi avec style ». Toute une solidarité s’est mise en place entre entrepreneurs chrétiens désireux de faire connaître leur travail via Instagram.
Mais pour rester « cool » sur le réseau social, certains sujets sont trop sensibles pour être évoqués. « J’évite les sujets politiques, de bioéthique ou de morale. Instagram ne s’y prête pas », estime Angélique. « Sans renoncer à nos opinions, mieux vaut montrer sur Internet un message de paix et d’espérance ». Ici, l’esthétique et l’artistique sont les meilleurs outils d’évangélisation.