Lors d'une audition en commission parlementaire, la directrice de la Sécurité sociale a reconnu un surnombre significatif, ajoutant que celui-ci n'entraînait pas «plus de consommation» de prestations.
Le grand débat sur l’estimation de la fraude aux prestations sociales en France est loin d’être terminé. Lors d’une commission parlementaire réunie sur le sujet mardi, Mathilde Lignot-Leloup, directrice de la Sécurité sociale, a reconnu un surnombre de 2,6 millions de cartes vitales actives, faisant craindre à certains observateurs une fraude sociale de grande ampleur.
Interrogée notamment par les députés Patrick Hetzel (LR), Pascal Brindeau (UDI) et Michel Zumkeller (UDI), Mathilde Lignot-Leloup a d'abord détaillé le dispositif de lutte anti-fraude de la Sécurité sociale, assurant qu’un «travail de fiabilisation est utile et nécessaire».
Le sujet a ensuite porté sur le nombre de cartes vitales actives en circulation, qui diffère du nombre de bénéficiaires légaux. «Il y a actuellement 58,3 millions de carte vitales en circulation » a-t-elle ainsi déclaré, pour « 55,7 millions » de porteurs potentiels, ce qui porte « à fin 2019, à 2,6 millions l’écart enregistré ».
Augmentation théorique du nombre de bénéficiaires légaux
Un chiffre qui est moins élevé que le précédent écart officiellement reconnu : en octobre dernier, la Caisse nationale de l'assurance maladie (CNAM) avait admis auprès d’une mission d’enquête parlementaire un différentiel de 5,2 millions de cartes vitales actives.
Pour expliquer cette évolution à la baisse, Mathilde Lignot-Leloup évoque deux éléments. D’abord, le nouveau calcul prend en compte les enfants à partir de 12 ans, qui peuvent avoir droit sur demande à une carte vitale, ce qui augmente - théoriquement - le nombre de porteurs potentiels. Ensuite, plusieurs opérations d’intégration de services territoriaux ou nationaux dans le fichier de la Sécu ont été effectuées, qui ont eu pour effet d’éliminer 830.000 cartes vitales sur la fin d’année 2019.
Le surnombre officiel reste toutefois particulièrement élevé. «Le député Michel Zumkeller a bien expliqué en commission que ces millions de cartes vitales représentaient un enjeu de 9 milliards d’euros par an pour l’assurance maladie», souligne auprès du Figaro Charles Prats, magistrat délégué de l’association professionnelle des magistrats.
Le magistrat, qui a fait de la lutte contre la fraude sociale son cheval de bataille, note que «le président de la commission Patrick Hetzel a dû insister à trois reprises» avant d'obtenir le chiffre. «Et maintenant on fait quoi ?» se demande l'ancien magistrat de la délégation nationale à la lutte contre la fraude.
[...] Mathilde Lignot-Leloup a enfin reconnu que l’estimation de l’ampleur de la fraude est «un sujet complexe» et évoqué le dispositif de lutte, notamment les comités départementaux de lutte contre la fraude, qui permettent «une approche coordonnée entre plusieurs organismes».