Les signataires expriment leur inquiétude concernant les conflits d’intérêts liés aux relations entre des juges de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) et des ONG, à la suite de la révélation par Valeurs actuelles d'un rapport consacré à l'influence de George Soros.
Juristes, professionnels du droit, universitaires ou magistrats, nous exprimons notre étonnement et notre inquiétude devant les situations de conflits d’intérêts que révèlent les relations existant entre des juges siégeant à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) et des ONG actives devant cette même Cour, tels qu’ils apparaissent dans le rapport « Les ONG et les juges de la CEDH : 2009 – 2019 » (ECLJ, Février 2020).
Ce rapport démontre en effet que 22 des 100 juges ayant siégé depuis 2009 sont d’anciens collaborateurs ou dirigeants de 7 ONG actives à la CEDH. Il prouve que 18 d’entre eux ont siégé, à 88 reprises durant cette période, dans des affaires impliquant l’organisation dont ils avaient été collaborateurs. Les recherches nécessaires pour établir ces faits, qui, à ce jour, n’ont pas été contestés par la Cour, établissent en outre que l’action des ONG auprès de la Cour manque significativement de transparence.
Contraires aux principes de l’éthique judiciaire, de tels faits mettent en cause l’indépendance et l’impartialité de la CEDH.
Compte tenu de l’importance de la jurisprudence de la CEDH au sein du système de protection des droits de l’homme, nous appelons la Cour à prendre les mesures qui s’imposent pour remédier à cette situation, tant pour clarifier le passé que pour préparer l’avenir.
Quant à la jurisprudence existante d’abord, nous demandons à la Cour de considérer favorablement, par principe, toute demande de révision d’un jugement auquel aurait collaboré un juge qui, susceptible de conflit d’intérêt, aurait alors omis de déclarer ses liens avec des ONG impliquées et de se déporter.
Pour l’avenir ensuite, nous demandons à la Cour de s’imposer le respect des règles qu’elle prescrit aux juridictions nationales en matière de droit à un procès équitable.
À cette fin, elle devrait en particulier :
- prescrire aux juges la publication de déclarations d’intérêts ;
- établir des procédures effectives de déport et de récusation ;
- informer à l’avance les parties de la composition de la formation de jugement ;
- imposer aux juges l’obligation, et non plus seulement la faculté, d’informer le Président en cas de doute quant à leur indépendance ou leur impartialité objectives ;
- établir un formulaire de demande de tierce intervention faisant apparaître les liens éventuels avec les parties principales ;
- insérer dans le formulaire de requête une rubrique demandant au requérant de déclarer si sa requête est introduite avec la collaboration d’ONG, et si oui lesquelles.
L’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, en charge de l’élection finale des juges, devrait en outre demander aux candidats à cette fonction de déclarer leurs liens avec toute organisation active à la CEDH et éviter l’élection de « militants » à la fonction de juge.
Juristes attentifs au respect des droits, nous considérons l’adoption rapide de telles mesures indispensable à une bonne administration de la justice, et nécessaire pour rétablir la confiance des justiciables et citoyens européens dans l’action de la CEDH.