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22 juillet 2020 22:59

Les agressions de pompiers se multiplient en France depuis plusieurs semaines. Des soldats du feu manifesteront le 24 juillet à Étampes, dans l’Essonne, où l’un des leurs a été victime d’un tir d’arme à feu alors qu’il était en intervention. Rémy Chabbouh, secrétaire national du syndicat Sud-SDIS, a confié sa colère au micro de Sputnik.

Il est 23h20 ce 14 juillet. Alors que les Français tentent de célébrer une Fête nationale un peu particulière en ces temps de pandémie, un pompier s’affaire à éteindre un feu de véhicule à Guinette, un quartier sensible de la ville d’Étampes, en Essonne. C’est à ce moment que le sergent-chef est touché au mollet par un tir d’arme à feu. La balle traversera sa jambe. «Une première intolérable» pour ses collègues qui, plus que jamais, crient leur colère face à l’insécurité grandissante à laquelle ils doivent faire face au quotidien. Le 24 juillet, ils manifesteront à Étampes afin réclamer la sécurisation de leurs interventions.

​«C’est l’horreur: comment peut-on vouloir tuer celui qui vient sauver?», s’est interrogé auprès de l’AFP Grégory Allione, président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF). Pour ce dernier, il s’agit ni plus ni moins d’une «tentative de meurtre».

«Nous vivons très mal cette situation. Les pompiers interviennent sur des secteurs très difficiles par tous temps et pour tout le monde. L’empathie envers nos concitoyens est maximale. Il est inacceptable d’attaquer les forces de l’ordre, mais je comprends la mauvaise gymnastique intellectuelle de ceux qui s’en prennent aux policiers.
En revanche, nous avons beaucoup de mal à comprendre les motivations de ceux qui agressent des sapeurs-pompiers», se désole au micro de Sputnik Rémy Chabbouh, secrétaire national du syndicat Sud-SDIS (service départemental d’incendie et de secours).

Comme si ce drame ne suffisait pas, la caserne d’Étampes a dû être évacuée le 21 juillet suite à la découverte d’une enveloppe pleine de poudre adressée aux soldats du feu. Si elle s’est révélée être de l’amidon, une substance inoffensive, le geste a tout de la menace et a nécessité l’évacuation du bâtiment, ainsi que la mise en place d’un périmètre de sécurité.

La situation préoccupe fortement Rémy Chabbouh:

«Nous sommes très inquiets de la gradation à laquelle nous assistons dans la violence. L’année dernière, quand des cocktails Molotov ont été jetés sur des véhicules incendie, nous nous sommes dit que nous avions atteint ce qui pouvait se faire de pire: des individus tentant de carboniser des pompiers dans leur véhicule. Maintenant, nous en arrivons à un tir à balles réelles sur un collègue, sans parler des attaques au mortier d’artifice d’un demi-kilo, qui peuvent brûler, voire sectionner un membre.»

«Beaucoup ce ceux qui agressent les sapeurs-pompiers ont entre 15 et 18 ans. Est-ce normal qu’ils se trouvent dehors à minuit avec des engins pyrotechniques? Je pose la question aux autorités. Peut-être qu’il faudrait l’interdire pour leur sécurité comme pour celle des pompiers», ajoute-t-il.

Une augmentation de 280% des agressions en dix ans

«La violence monte en puissance, on arrive à un niveau qu’on ne peut plus accepter. […] Il faut réagir avant qu’il y ait un drame», s’est quant à lui insurgé auprès du Parisien Alexandre Prunet, président du syndicat CFTC-SPA du SDIS 91.

Rémy Chabbouh l’assure, il y a péril en la demeure des pompiers de France:

«La nuit du 14 juillet, les pompiers sont intervenus pour éteindre des véhicules en feu dans lesquels avaient sciemment été placées des bouteilles de gaz. Des individus sont prêts à tuer des pompiers dans certains quartiers. Ce ne sont pas des “incivilités”, comme je l’entends parfois de la bouche d’hommes politiques ou de journalistes, mais des tentatives de meurtre», s’alarme Rémy Chabbouh.

Gérald Darmanin, le nouveau ministre de l’Intérieur, s’est rendu le 15 juillet à Étampes pour assurer les soldats du feu de son soutien. «La République ne reculera jamais devant ces attaques gravissimes», a-t-il affirmé. En retour, Rémy Chabbouh se rendra au ministère de l’Intérieur le 24 juillet. Il attend du concret de cette rencontre:

«Les sapeurs-pompiers sont très pragmatiques et sont conscients du danger de leurs missions quant au gaz, à l’électricité, aux catastrophes naturelles et évidemment au feu. Mais nous ne sommes pas formés pour faire face à une telle violence, qui peut aujourd’hui survenir partout et à tout moment.»

«Nous demandons l’anonymisation des dépôts de plainte pour les pompiers, car beaucoup, principalement les volontaires, vivent avec leur famille dans la même zone que celle où ils interviennent. Nous souhaitons également la mise en place systématique de caméras embarquées dans les véhicules afin de filmer l’environnement de l’intervention. Cela fonctionne très bien dans les pays de l’Est ou en Asie et permet de mieux appréhender les auteurs d’agressions. Enfin, nous voulons un Beauvau de la sécurité civile sur le même modèle que le Grenelle de l’environnement ou le Ségur de la santé, afin de traiter les nouveaux risques liés aux agressions», poursuit le soldat du feu.

Le 19 juillet, ce sont trois pompiers du Gard qui ont été agressés par un groupe d’individus à Marguerittes, près de Nîmes. Ils étaient intervenus afin de sauver un chat blessé et ont été pris à parti verbalement, puis physiquement. Un des pompiers a reçu une gifle et un autre a été touché par un jet de pierre. Plusieurs plaintes contre X ont été déposées auprès des gendarmes par les personnels du SDIS du Gard et une enquête a été ouverte pour «violences volontaires sur personnes chargées d’une mission de service public».

«Des peines exemplaires»

La justice est un élément clef de la solution, selon Rémy Chabbouh. Ce 22 juillet, la préfecture de Moselle annonçait dans un communiqué que deux individus avaient été condamnés à des peines de prison ferme pour avoir agressé des pompiers dans l’exercice de leurs fonctions à Metz et Behren-lès-Forbach.

Fin juin, un équipage composé de trois sapeurs-pompiers intervenait en gare de Metz afin de porter secours à l’un des agresseurs condamnés. Il avait insulté, menacé et pris à partie physiquement deux sapeurs-pompiers avant que la police n’intervienne. Le tribunal correctionnel de Metz l’a condamné le 17 juillet à une peine de 18 mois d’emprisonnement, dont 12 mois avec sursis.

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