Le déplacement revêt une forte valeur symbolique. Ce jeudi 9 décembre, la ministre Marlène Schiappa s’est rendue au centre de la RATP situé aux Pavillons-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), à l’occasion de la journée de la laïcité. Le lendemain, Azdyne Amimour, le père du terroriste Samy Amimour, co-auteur de l’attentat du Bataclan, témoignera devant la cour d’assises de Paris.
Samy Amimour présentait la particularité d’avoir été conducteur de bus à la RATP, dans ce même dépôt des Pavillons-sous-Bois, cité par Denis Maillard, auteur de l’ouvrage Quand la religion s’invite dans l’entreprise (Fayard), publié en 2017, comme un bastion de revendications communautaires : “Pavillons-sous-Bois est l’un de ces centres (il y en aurait deux autres en région parisienne) où le management a dû battre en retraite face à la force des revendications communautaires et religieuses.
Pièces collectives fermées et inaccessibles à la direction (avec des soupçons de trafic), refus de certains machinistes de serrer la main aux femmes et même de toucher le volant après elles, autobus immobilisés pendant que les conducteurs font leurs prières… Les coups de canif à la sacro-sainte laïcité, règle d’airain dans les services publics, sont devenus légion”.
Ces dernières années, plusieurs autres affaires ont émaillé la vie de l’entreprise publique, perçue comme particulièrement en proie au “séparatisme”, cette organisation à part du reste de la société, dans laquelle les engagements communautaires prennent le pas sur les règles de la République.
Un rapport d’information signé des députés Eric Poulliat (LREM) et Eric Diard (LR), en juin 2019, se veut extrêmement alarmiste. “Le phénomène de communautarisme constaté au sein de certains dépôts de la RATP doit faire l’objet de la plus grande attention”, écrivent les parlementaires. “Ont pu être évoqués les exemples d’agents priant sur leur lieu de travail ou refusant de serrer la main d’une femme ou l’apparition d’un syndicat communautariste dans les élections professionnelles de certains dépôts”, décrivent-ils.
Il s’agit du syndicat antiprécarité (SAP-RATP), rebaptisé par certains agents “le syndicat pour musulmans”, écrit encore Denis Maillard dans son livre, qui a raflé plus de 50 % des voix aux élections professionnelles de 2014 sur deux centres bus : dans le XVIIIe arrondissement de Paris et aux Pavillons-sous-Bois.
“Aujourd’hui, à la RATP, quand vous êtes musulman et que vous n’allez pas à la prière le vendredi, on va vous le dire. Il y a une volonté qu’il y ait une pratique de l’islam rigoriste. Et donc on devient radical pour ne pas être embêté. Ça fait partie des choses qui nous sont remontées”, explicite auprès de L’Express Eric Poulliat, qui a interrogé des hauts-cadres de l’entreprise comme des syndicalistes et des managers de terrain. (…)