Promesse coûteuse, subventions aux associations sans contrôles, trains sans voyageurs... Pour l'édition du JDD du dimanche 20 mars, la Fondation iFRAP a passé en revue une série d'exemples de gaspillage d'argents publics :
Occitanie : ruineux conseil régional
Malgré la fusion des Régions, nombreuses sont celles qui ont conservé plusieurs hôtels de Région. Ainsi, Rouen doublonne avec Caen, Lyon avec Clermont-Ferrand et Toulouse avec Montpellier. Mais l’hôtel de Région de Montpellier est trop petit pour recevoir le conseil régional en plénière. Comme au moment de la fusion, l’exécutif régional s’est engagé à réunir les assemblées plénières à Montpellier, il doit louer le parc des expositions de la ville pour pouvoir accueillir les 158 conseillers de la Région.
Depuis le 15 avril 2016, 20 assemblées plénières ont eu lieu dans ces conditions : la première au Corum de Montpellier pour des frais se montant à 64 441 euros, puis au parc des expositions de la ville pour une dépense de 140 000 euros, en moyenne, jusqu’au premier semestre 2018, puis un coût abaissé de 30 %. Au final, le coût cumulé de ces locations représente environ 2 millions depuis 2016. Et ce alors même que la Cour des comptes a chiffré le coût d’un agrandissement de l’hémicycle de Toulouse à 7 millions d’euros tandis qu’un groupe d’élus de l’opposition, UEDC, estime, lui, qu’un aménagement est possible pour 120 000 à 800 000 euros.
Subventions hors contrôle dans la Manche
Le comptable public du département de la Manche s’est trouvé condamné par la chambre territoriale des comptes compétente le 11 février 2021 : en substance, il avait payé en 2017 trois subventions au bénéfice du Club de kayak de mer du Nord Cotentin d’un montant de 29 700 euros, 31 664 euros à l’association diocésaine de Coutances, et deux subventions d’un montant total de 152 450 euros au bénéfice de l’association MFREO Vains.
Car le département ne disposait pas «d’un dispositif de suivi annuel des sommes allouées en cas de pluralité de versement de subventions, leur permettant de constater le dépassement du seuil de 23 000 euros ».
Pourtant, tout cela est très encadré par la loi : lorsque les subventions dépassent le seuil de 23 000 euros, les personnes publiques attributives doivent demander aux associations concernées la conclusion d’une convention d’objectif précisant l’objet, le montant, les conditions de versement et l’utilisation de la subvention. Cela montre la légèreté avec laquelle un certain nombre d’organismes publics attribuent leurs subventions publiques. Là encore l’exemple peut sembler banal, il est portant particulièrement significatif de «pratiques » et du flou qui entourent l’attribution de certaines subventions et du contrôle quasi inexistant ensuite.
Un train d’enfer pour les primeurs
Le train qui transporte des fruits et légumes en wagons réfrigérés depuis Perpignan au marché de Rungis a été relancé par Jean Castex en octobre dernier : douze wagons, cinq fois par semaine. Contre trente wagons auparavant. La remise en service a été prévue jusqu’en 2024 grâce à la mise en place d’une subvention de 14 millions d’euros. Cher pour un équivalent de quinze camions face aux 25 000 camions qui assurent la liaison Perpignan-Rungis. Ce train des primeurs avait été supprimé en 2019 pour cause de vétusté du matériel et de faible demande.
À l’époque, les deux principaux clients n’ont pas souhaité renouveler leur contrat avec la SNCF car le train roulait à vide au retour (dans le sens Paris-Perpignan). Faute de clients… Étrangement, eu égard à cette expérience, le gouvernement reste optimiste sur un avenir du train des primeurs possible sans subvention, mais les professionnels demandent à voir. De précédentes tentatives de relance de ce train des primeurs avaient conduit à choisir le terminal de Valenton, également dans le Val-de-Marne, avec des conteneurs sur rails. Problème, le train ne pouvait parvenir en région parisienne qu’après 6 heures du matin. Trop tard pour les clients de Rungis.
Très cher Forum des images
Lorsqu’on se penche sur les subventions versées par la Ville de Paris, il y en a une qui sort du lot : celle qui revient au Forum des images. En 2020, 7,4 millions (dont une subvention d’investissement de 1,6 million pour s’équiper d’un écran géant), somme à laquelle s’est ajoutée une «subvention de fonctionnement supplémentaire » de 940 000 euros après la crise du Covid.
Ajoutons 6 000 mètres carrés de locaux prêtés à titre gracieux dans le Forum des Halles par la mairie de Paris. Mais qu’est-ce que le Forum des images ? «Vidéothèque de la ville de Paris », «salle de cinéma » (cinq salles de projection pour 850 places), «fonds d’archives des films ayant Paris comme fond et/ ou sujet » ou «une école du numérique » ? On s’y perd totalement.
Étonnamment, les comptes de l’association, qui emploie 80 personnes, ne sont pas disponibles en ligne. Tout au plus sait-on qu’en 2009, le budget du Forum des images était de 8,7 millions d’euros, aux trois quarts financés par les subventions de la Ville de Paris, pour 300 000 visiteurs, dont 50 000 jeunes et scolaires. Depuis trente-six ans, cette association hyper subventionnée a dû percevoir près de 200 millions d’euros de subventions.
Gares fantômes et puits sans fond
La publication en 2018 du rapport Spinetta sur notre réseau ferroviaire – en pleine grève de la SNCF – a été un choc. Parmi les 200 lignes classées en catégorie UIC (Union internationale des chemins de fer) 7 à 9, un quart comptent plus de 50 voyageurs par train. La moyenne est inférieure à 30 voyageurs par train. En 2018, 551 gares avaient accueilli moins de 10 voyageurs par jour en moyenne, selon la Cour des comptes. On dénombre même 32 gares sans aucun passager. En 2017, en Région Pays de la Loire, des trains chargés de plus de 200 voyageurs se sont arrêtés en gares de Donges, La Croix-de-Méan ou Penhoët sans qu’aucun voyageur ne monte ni ne descende.
Des arrêts qui allongent les temps de parcours et détournent l’intérêt des voyageurs pour le ferroviaire. Les dépenses publiques consacrées aux petites lignes s’élèvent à 1,7 milliard par an à rapporter à moins de 10 % des trains et moins de 2 % des voyageurs. Chaque kilomètre parcouru par un voyageur coûte ainsi 1 euro à la collectivité. Problème : les coûts fixes pour faire rouler les trains étant élevés, ce n’est qu’au-delà de 160 à 180 voyageurs, que ce mode de transport est pertinent par rapport au car, au covoiturage et même à la voiture particulière.