Le triple sommet Otan, Conseil de l’Europe, G7 confirme la tendance atlantiste engagée depuis dix ans, consistant à renforcer ses positions sur le flanc oriental de l’Europe. Ce n’est plus une question d’élargissement, mais de présence.
Une zone du monde où, grâce à une subtile politique clientéliste, la marge d’expansion et d’influence de l'Otan est totale.
Dès la fin de la matinée, l’Otan annonçait quatre nouvelles bases en Slovaquie, Hongrie, Roumanie et Bulgarie. Soit 100 000 soldats sous commandement direct américain et 40 000 sous commandement de l’Otan sur le continent européen.
Le tout dans un contexte de guerre larvée avec la Russie. Joe Biden précise que c'est pour mieux nous protéger.
Ce déploiement est précédé par les déclarations alarmistes du Premier ministre polonais, Joi Mateuw Morawiecki, selon lequel la Russie est devenu "un État totalitaire" et "qu’après l’Ukraine, Poutine va avancer sur Helsinki, Varsovie, Bucarest et peut-être Berlin".
Les hostilités entre la partie orientale de l’Europe, à dominante slave, balkanique ou balte ont atteint un point de non-retour. Il y a une semaine, Morawiecki avait demandé "l’arrêt de toute forme de commerce entre l’UE et la Russie".
La veille du sommet, et la date n’est pas un hasard, le gouvernent polonais avait ordonné l’expulsion de 45 diplomates russes, les accusant de se livrer à des activités d’espionnage.
Un individu a d’ailleurs été détenu au motif d'actes d’intelligence avec la Russie. Pour le Ministère des affaires étrangères russe, "il s’agit d’un pas assumé vers la destruction définitive des relations bilatérales.
Les alliés polonais se sont engagés à démanteler ces relations de forme systématique depuis longtemps. (…) Nous le voyons et nous en tiendrons compte dans la pratique envers la Pologne". Dans le même communiqué, la Russie estime que "Varsovie s’est engagée dans une dangereuse escalade qui ne va dans le sens de ses intérêts, mais dans ceux des lignes directrices de l’Otan. L’Alliance est engagée dans une franche russophobie".
La Pologne est donc à cinq minutes de rompre les relations diplomatiques avec la Russie. D’autres pays de l’ancien bloc de l’Est pourraient suivre. Un discours menaçant, doublé d'une teinte courtisane à l'égard du bloc occidental, est savamment entretenu.
Des États faillis, des économies frontières d’Europe de l’Est se retrouvent bientôt dans la cour des grands, du fait de leurs intérêts géostratégiques. La Roumanie est en première ligne. Le président Klaus Iohannis a davantage de relation avec le président des États-Unis que celle que ce dernier pourrait entretenir avec un chef d’État du sud de l’Europe.
La Roumanie attend beaucoup de dividendes du nouvel instrument de Boussole Stratégique, mis en place par le Conseil de l’Europe le 21 mars dernier, dans le cadre d’un plan de sécurité d’ici à 2030, en coordination avec l’Otan. On en parle plus à Bucarest qu'à Paris.
Dans le cadre de l’expansion de l’Union européenne, il y aurait donc des nations qui de par leur histoire entretiennent une attitude extrêmement vindicative à l’égard de la Russie. Nations en osmose totale avec le pacte de sécurité nord-atlantique et donc les intérêts partisans américains du moment.
Et puis le cœur de l’Europe occidentale qui ayant su entretenir des relations plus sereines avec la Russie postsoviétique, voire de distance critique avec l’Otan ce, à des degrés divers.
Ces pays de l’Europe orientale, encore très ethnicisés, se sont graduellement engagés dans une radicalité de guerre froide, propre à une histoire qui leur appartient, laquelle entre en collision avec les garanties de paix et de sécurité de l’Europe occidentale.