Malgré la hausse des coûts de production et, pour certaines le coût du retrait de Russie, les entreprises du CAC 40 réalisent encore de superbes bénéfices. Une manne largement redistribuée aux actionnaires, et beaucoup moins aux salariés.
Les entreprises françaises du CAC 40 ont dégagé 142 milliards d'euros de bénéfices cumulés en 2022 grâce aux records atteints dans le luxe et l'énergie. Leur chiffre d'affaires cumulé atteint 1 729 milliards d'euros, selon un décompte de l'AFP, en hausse de 19% sur un an, grâce aux ventes gonflées par l'inflation pour de nombreux groupes
Le bénéfice net recule de 9% par rapport aux près de 156 milliards de 2021, année marquée par le résultat hors norme de près de 25 milliards de Vivendi en raison d'une cession. En 2022, le géant des médias est même passé dans le rouge, affichant avec 1 milliard d'euros la pire perte du CAC 40.
Le calcul de l'AFP ne prend pas en compte deux groupes, Pernod Ricard et Alstom, qui ont des exercices comptables décalés.
Le recul agrégé masque néanmoins des records dans plusieurs secteurs, à commencer par l'énergie et son fleuron TotalEnergies, qui affiche avec 19,5 milliards d'euros, le plus gros profit de l'indice, devant le constructeur automobile Stellantis avec 16,8 milliards d'euros. Le plus gros profit d'une entreprise française en 2022 est cependant celui de CMA-CGM, troisième armateur mondial, non coté en Bourse, avec 24,9 milliards de dollars.
Le secteur de l'énergie réalise 23,2 milliards d'euros de bénéfice (+14%) malgré d'importantes charges liées à la guerre en Ukraine. Hors effets comptables, les bénéfices bondissent davantage, reflétant l'année exceptionnelle alimentée par la hausse des prix de l'énergie, dans le sillage de la reprise post-Covid et du conflit en Ukraine.
Ce conflit a également eu un impact sur l'activité d'industriels comme ArcelorMittal, avec un milliard de dollars de provisions pour couvrir ses pertes ukrainiennes. Renault affiche la deuxième perte nette du CAC, de 338 millions d'euros, après une charge de 2,3 milliards causée par la vente d'Avtovaz, fabricant russe des Lada.
A l'inverse, le luxe (LVMH, Kering, Hermès, L'Oréal) a vu ses profits enfler de 23%, soit 4,5 milliards d'euros de plus sur un an et une progression de 80% comparé à 2019. Il doit ce résultat à la possibilité qu’a ce secteur de répercuter la hausse de ses coûts de production sur ses prix de vente.
Les plus fortes hausses de bénéfice reviennent à Orange (+820% comparé à 2021, année plombée par une dépréciation) et au fabricant de semi-conducteurs STMicroelectronics (+118%), qui a profité de la forte demande mondiale pour la denrée rare que constituent les puces électroniques.
Comme les bénéfices, les versements de dividendes aux actionnaires progressent, sous une pluie de critiques reprochant aux entreprises de ne pas verser autant aux salariés, ni d'en faire assez pour le climat.
Aucun groupe du CAC 40 n'a annoncé de baisse de ses dividendes alors que ceux-ci avaient déjà atteint un record en 2022, en France (56,5 milliards d'euros) et dans le monde (1 560 milliards de dollars).
6 milliards pour les actionnaires, 400 000 euros pour les salariés
LVMH, qui a payé 5 milliards d'euros d'impôts sur les sociétés dans le monde, devrait verser au total quelque 6 milliards d'euros à ses actionnaires, dont près de 3 milliards reviennent à la famille du PDG Bernard Arnault, contre 400 millions d'euros à ses quelque 39 000 salariés français.
Société Générale veut redistribuer 90% de son bénéfice aux actionnaires, avec une hausse du dividende, malgré la chute de son résultat sous l'effet de la cession de sa filiale russe Rosbank.
TotalEnergies va investir 16 milliards de dollars, dont 4 dans des «énergies bas-carbone», et payer près de 9 milliards d'euros de dividendes.
Stellantis va gratifier ses actionnaires de 4,2 milliards d'euros de dividendes, dépenser 1,5 milliard en rachats d'actions... et débourser 2 milliards en primes pour ses salariés.
t.me/russiejournal