Abdennour Bidar, philosophe, explique pourquoi il a voté blanc à l’avis rendu le 15 octobre par l’Observatoire national de la laïcité, dont il est membre. Un avis qui ne se prononçait pas en faveur d’une nouvelle loi, qui étendrait au secteur privé le principe de laïcité.
Je suis conscient du risque qu’une loi – mal faite – pourrait alimenter une fois de plus le grief que les religions sont stigmatisées, en particulier l’islam. […]
Néanmoins, je crois toujours en l’utilité possible de cet Observatoire, et je reste confiant quant à ses propositions ultérieures, mais il va devoir se choisir un destin personnel au plus loin de deux impasses.
La première est celle de la droite dure et de l’extrême droite : dévoyer le sens de la laïcité pour en faire une arme contre la diversité, un instrument d’exclusion au service d’ réactionnaire de l’identité française.
La seconde impasse. […] Du renoncement à dire quoi que ce soit d’un peu «puissant» ou ambitieux sur la laïcité, de peur que cela passe pour de la stigmatisation des religions, notamment de l’islam. Tel est bien le piège où les républicains de gauche et de droite semblent pris aujourd’hui: la paralysie de la pensée et de l’action par préjugé que toute réaffirmation du principe de laïcité sera «inévitablement» récupérée par les forces d’exclusion et de division.
Que vaut en réalité ce parti pris ou ce calcul du «ne faisons rien car tout ce qu’on ferait remettrait le feu aux poudres» ? Electoralement rien : les Français en ont assez de l’absence de courage politique,et ils continueront de se jeter dans les bras de l’extrême droite tant que la gauche et la droite républicaines n’oseront pas fabriquer un discours alternatif sur la laïcité, l’immigration, l’intégration, l’islam. Ce discours est possible. […]