Les sociétés multiculturelles sont vouées à être multi-galères, multi-chiantes, multi-criminelles.
Babel ne sera jamais cool. Les sociétés multiculturelles sont vouées à être multi-galères, multi-chiantes, multi-criminelles. Les émeutes du Missouri sont là pour nous le prouver.
La société américaine est apaisée. Dans les séries télé ou dans les films. Parce que dans la réalité, c’est assez tendu. Prenez le Missouri. Deux nuits d’émeutes raciales (pardon, « sociales », me souffle un collègue de Libé) après la mort d’un jeune noir de 18 berges.
Le garçon s’appelait Michael Brown. Il avait tout l’attirail du jeune ricain d’aujourd’hui, obèse portant une veste de sport, casque sur les oreilles. Dans son rôle, quoi. D’ailleurs, cette photo diffusée partout a fait polémique. Pourquoi ne l’a-t-on pas présenté sous un jour souriant, avec sa famille ? disent avec justesse de nombreux internautes, accusant les médias d’avoir des « préjugés ». On aurait pu aussi balancer une photo où Michael lisait un gros volume de chez Proust, non ?
Samedi après midi, il se baladait avec un pote à Ferguson, banlieue de Saint Louis, capitale de l’État du Missouri, quand les deux jeunes hommes croisèrent une voiture de flic. D’après la version de la police locale, il y aurait eu une altercation à ce moment-là. Michael ou son ami ayant même essayé de prendre l’arme du policeman après l’avoir poussé dans son véhicule. Dans la version de témoins présents dans la rue, le gamin aurait levé les bras en l’air sur demande et le flic aurait arrosé de son gun illico. D’aucuns parlent d’une véritable « exécution ». Les images de la nuit qui a suivi fleuraient bon les sixties : « White cops », balèzes, crâne rasé, chien en laisse aboyant devant une foule à peau sombre.
Même si certains médias parisiens parlent d’emblée de « racisme », ça va être difficile de faire le tri, car les paroles se dresseront face aux paroles, les haines face aux haines. La tête froide, on peut néanmoins se dire que si les flics US sont plutôt chatouilleux du flingue, on a quand même peine à imaginer que le représentant des forces de l’ordre ait balancé la sauce comme ça, sans raison.
Si c’est vrai, c’est que la peur – fille d’une tension permanente – a pu faire son chemin dans l’esprit du tireur. La peur inhérente aux sociétés « babéliques », par essence bordéliques. Des sociétés où l’on compte le nombre de blancs dans le service, de « Negro » dans la classe, de « Latino » dans le quartier. Des mondes où l’on se compte dans chaque camp, parce qu’il n’y a plus de majorité légitime.
À peine le coup de feu résonnait-il encore, à peine l’odeur de poudre s’envolait, la nouvelle du drame se répandit aussi vite qu’un tube de rap sur les ondes. Comme toujours, ce fut l’émeute, le pillage. Communauté noire à peu près soudée et communauté blanche apeurée ; avant c’était l’inverse, of course. Mais au final, le scénario n’en finit plus de dérouler le même cinoche : Los Angeles, Detroit, Missouri… toujours « l’incident », toujours les manifs et la violence.
Dire qu’en France on y va tout droit !
SOURCE : BOULEVARD VOLTAIRE