L’écrivain algérien Boualem Sansal fait sensation avec un essai intitulé «Gouverner au nom d’Allah : Islamisation et soif de pouvoir dans le monde arabe» sur les origines, les tabous et la propagation de l’islamisation dans le monde arabe et en Europe
S’il y a un responsable de la situation dramatique en Europe, ce sont les politiques. Ils représentent un danger car, à force d’aller de compromis en compromis, ils vont de compromission en compromission.
En tant qu’Algérien, de quoi êtes-vous le témoin ?
J’ai vu l’islamisme arriver sous mes fenêtres. En quelques années, il a détruit des familles, une culture, une économie et des vies, tout en se répandant partout. On ne peut pas rester indifférent face à ce phénomène qui risque d’arriver aussi chez vous. Au lieu de se comporter en militants, les gens regardent la télé sans broncher. Voyez Hollande qui n’a jamais désigné l’ennemi lors de sa visite au Mali. Ne pas nommer les islamistes revient à les protéger !
Ce livre rappelle que l’islamisme est né de l’islam par un glissement progressif. Où commence le premier ? Dans la volonté agressive de domination et dans celle de vouloir imposer une idéologie au plus grand nombre. Elle est alimentée par certains musulmans radicaux, mais l’islam a rarement été tranquille. Prônant le prosélytisme, il s’est souvent imposé par le glaive et les armes. […]
Qu’est-ce qui explique cet engouement en Europe, que ce soit auprès des jeunes musulmans ou des convertis ?
La régression de l’Occident y est particulièrement propice. Les Européens ne croient plus en l’avenir de l’Europe, qui n’a ni armée ni diplomatie et se montre incapable de coordonner la gestion de la crise économique. Ceux qui aspirent à la domination mondiale se portent bien, grâce au pétrole ou à une croissance à deux chiffres. Alors autant profiter de l’affaiblissement pour achever la bête ! Je suis effrayé par l’évolution foudroyante de l’islamisme européen en moins de dix ans. Quand on est fatigué, on attrape toutes les maladies…
Autre cause : la crise identitaire. Non seulement l’identité européenne n’émerge pas, mais en plus elle fissure le système en place. Ceux qui ne sont pas de cette culture, ne peuvent pas et ne veulent plus s’intégrer. D’ailleurs, les «pays d’origine» font tout pour contrebalancer une intégration réussie. Ils craignent que si les communautés maghrébines se francisent ou se belgicisent, elles «pervertiront» leur culture. […]