Au pays des quotas, un tabou est tombé. Mardi, la Cour suprême des Etats-Unis a finalement validé une loi de l’Etat du Michigan qui interdit les quotas raciaux à l’université, la fameuse discrimination positive héritée du mouvement des droits civiques des années 1960. Six des neuf juges américains ont voté en faveur du feu vert à la loi du Michigan, qui interdit la prise en compte de l’origine ethnique ou du sexe dans les procédures d’admission à l’université. Signe que la question provoque un vrai débat, la plus haute juridiction américaine aura mis cinq mois à trancher.
Ce qui va changer. En vertu des lois sur la discrimination positive, il suffit actuellement souvent de cocher une simple case indiquant son appartenance au moment de l’inscription pour remporter des points supplémentaires.
Ces mesures ont permis à des générations de jeunes Noirs ou d’Hispaniques de décrocher des diplômes qui leur semblaient auparavant inaccessibles. Parmi eux, Sonia Sotomayor, d’origine portoricaine, juge à la Cour suprême et farouche opposante à la législation du Michigan. C’est grâce à la discrimination positive que la première juge de la Cour suprême d’origine hispanique a pu intégrer la prestigieuse université de Princeton, dans les années 1970.
Mais désormais dans le Michigan, avec cette loi approuvé par référendum dès 2006, les universités publiques, les écoles et les recruteurs pour les emplois publics ne pourront plus « discriminer ou accorder un traitement préférentiel » aux Noirs ou aux Hispaniques.
Un combat anti-quotas ancien. Aux Etats-Unis, c’est un tabou qui est brisé, même si la discrimination positive a déjà du plomb dans l’aile. Car depuis plusieurs années, des étudiants blancs contestent notamment ces mesures, arguant qu’ils se sentent discriminés. Au Texas, une jeune étudiante blanche, Abigail Fisher, a poursuivi l’université d’Austin, qui n’avait pas accepté son dossier. Son cas doit lui aussi être étudié par la Cour suprême. Les étudiants ne sont pas les seuls : certains chercheurs notent que malgré l’augmentation du nombre de diplômés noirs, leur taux de chômage demeure deux fois plus élevé que celui des Blancs. Dans le pays, un Noir sur quatre vit sous le seuil de pauvreté.
Un autre système à inventer. Certains Etats, comme la Californie ou la Floride, ont déjà interdit la discrimination positive dans les établissements publics. Les résultats se font sentir, selon le New York Times : dans ces Etats, la part des étudiants noirs ou hispaniques dans les établissements les plus sélectifs a baissé de façon sensible. D’autres Etats, comme l’Arizona, l’Alabama, la Géorgie ou encore l’Oklahoma ont scruté de près la décision prise à Washington, dans l’espoir de pouvoir s’engouffrer dans la brèche.
Mais des voix s’élèvent aussi pour demander l’application d’une autre forme de discrimination positive, qui prendrait en compte des critères purement économiques, en favorisant les étudiants les plus démunis ou en mettant en place des indicateurs permettant de mesurer de façon plus fine le désavantage auquel l’étudiant doit faire face.