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22 juillet 2012 02:59

Syringe / Andres Rueda via FlickrCC License by -

- Syringe / Andres Rueda via FlickrCC License by - -

Le pouvoir socialiste a-t-il ou non une doctrine sur la médicalisation de la fin de vie? On pouvait, depuis des années, raisonnablement en douter. L’impression se confirme. Effleurée durant la campagne pour l’élection présidentielle la question avait été évitée lors du discours de politique générale, le Premier ministre ayant auparavant choisi une station radiophonique catholique nantaise pour faire ici l’exégèse de la pensée présidentielle. François Hollande reprend la main aujourd’hui en s’exprimant pour la première fois depuis son élection. Il l’a fait lors d’un déplacement à la Maison Notre-Dame-du-Lac de Rueil-Malmaison(Hauts-de-Seine), un établissement spécialisé dans l’accompagnement de la fin de vie et le traitement de la douleur.

Deux conceptions philosophiques

Qu’a-t-on appris de nouveau? Qu’un débat national était lancé, qu’une réforme verrait le jour «dans les prochains mois» et qu’une (nouvelle) mission sur ce thème venait d’être confiée par le pouvoir sur cette question, cette fois au Pr Didier Sicard, spécialiste de médecine interne et ancien président (de 1999 à 2008) du comité national d’éthique.

François Hollande  sait parfaitement qu’il entre sur un terrain politiquement difficile car éminemment «clivant» (1). En privé il n’a jamais caché le jugement très positif qu’il porte sur la loi Leonetti sur le droit des malades en fin de vie. Défendue par le député (UMP) Jean Leonetti cette loi avait notamment instauré un droit au «laisser mourir» en permettant, après décision médicale collégiale, d'arrêter un traitement ou de refuser des formes d’acharnement thérapeutique.

Le 17 juillet François Hollande  a d’ailleurs rendu hommage à ce texte qui, a-t-il dit, «permet d’éviter depuis 2005 les traitements déraisonnables et tout acharnement thérapeutique». Il n’a jamais caché non plus, toujours en privé, qu’il ne partage pas les positions extrêmes défendues par celles et ceux qui entendent créer via la loi un droit au suicide médicalement assistée. Cette option fondée notamment sur le doit de disposer librement de son corps est défendue depuis plus de vingt ans avec constance dans les médias par l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD). Le candidat Jean-Luc Mélenchon en a également fait la promotion lors de la campagne présidentielle Mais une large majorité des membres du corps médical français et de ses représentants sont opposés, pour des raisons essentiellement déontologiques, à l’idée qu’ils pourraient être conduits à devoir administrer, à la demande, une substance létale pour mettre fin à des souffrances quelle que soit l’intensité de ses dernières. Tout laisse penser que le Pr Didier Sicard partage cette position.

Euthanasie, un mot tabou

Reste que le président de la République juge politiquement nécessaire d’organiser un nouveau débat national sur ce thème, sept ans seulement après la promulgation de la loi Leonetti. Il justifie sa position en formulant non pas des questions de fond mais en invoquant des situations exceptionnelles. «Peut-on aller plus loin dans les cas exceptionnels où l’abstention thérapeutique ne suffit pas à soulager les patients aux prises avec une douleur irréversible et qui appelle un acte médical assumé au terme d’une décision partagée et réfléchie s’est-il interrogé le 17 juillet à la Maison Notre-Dame-du-Lac. Poser cette question c’est poser une perspective qui elle-même entraîne un débat.» Il a ajouté qu’il entendait et respectait les consciences des autorités spirituelles qui affirment le principe selon lequel tout instant de vie mérite d’être vécu.

Le 4 juin Jean-Marc Ayrault s’était exprimé sur ce thème à Radio Fidélité  une station  chrétienne nantaise. Le site catholique Gènéthique en avait alors fait état. Le Premier ministre avait rappelé que François Hollande s’était engagé, dans son programme, à permettre à certains malades de «bénéficier d’une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité.» Jean-Marc Ayraut avait également exprimé sa volonté de «perfectionner la loi […] dans l’esprit du projet de François Hollande». Rien pour autant n’était selon lui acquis quant à la nécessité de modifier la loi.  Et Jean-Marc Ayrault de prendre soin de rappeler que François Hollande «n’a jamais employé le mot euthanasie».

En charge des questions sociales Marisol Touraine avait fait de même à plusieurs reprises lors de la campagne présidentielle. Et le 17 juillet à la question qui lui était posée de savoir si le mot «euthanasie» était pour lui un mot tabou François Hollande a répondu: «Ce n’est pas le mot que j’ai employé». Tout se passe comme si le simple fait de prononcer ce mot équivalait, pour François Hollande, à prendre position en faveur du droit au suicide médicalement assisté.

Un consensus impossible

De ce point de vue les militants de l’ADMD n’auront pas manqué d’observer que Mgr André Vingt-Trois, président de la Conférence des évêques de France, après avoir été reçu à l’Elysée a souligné que la question que venait de soulever le président de la République sur la fin de vie était «une bonne question» et que «poser une question ne signifie pas qu’on y répond positivement.» Pour sa part, Jean Leonetti propose désormais un large débat public sur la fin de la vie, ne se limitant pas à la question de l'euthanasie. Aussi l’ADMD ne montre-t-elle guère d’enthousiasme. Saluant l'initiative du chef de l'Etat elle dit déjà s'inquiéter des pressions possibles des «lobbies pro-life et ultrareligieux». Et elle l’exhorte à entendre le combat des associations laïques qui demandent le respect absolu des volontés des patients.

Le chef de l’Etar et le gouvernement ont choisi de se donner «quelques mois» avant de trancher. Rien ne dit que ce délai sera suffisant pour  trouver - et ce uniquement pour quelques cas dramatiques mais exceptionnels de fin de vie - un consensus politique entre deux positions philosophiques que tout oppose.

(1) Dans son programme François Hollande précisait: «Je proposerai que toute personne majeure en phase avancée ou terminale d’une maladie incurable, provoquant une souffrance physique ou psychique insupportable et qui ne peut être apaisée, puisse demander, dans des conditions précises et strictes, à bénéficier d’une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité.»

Jean-Yves Nau

Le président de la République annonce un débat autour de la loi Leonetti mais se refuse, une nouvelle fois, à prononcer le mot «euthanasie». Pourquoi?

 

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CITOYENS ET FRANCAIS - dans Société