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24 mai 2012 02:42

« Toute forme de discrimination est incompatible avec l’appartenance au Mouvement olympique ».  C’est  par cette phrase clé, que Annie Sugier (2)  commence son livre. Elle nous explique le combat qu’elle  mène depuis plus de vingt ans. C’est pour le porter à la connaissance du plus grand nombre, qu’elle s’est attelée à l’ ouvrage qu’elle nous livre, quelques mois avant les Jeux Olympiques de Londres.

 

« Le 25 juillet 1992, les cris d’admiration  montent d’un cran au moment précis de l’entrée des athlètes d’Afrique du Sud dans le Stade Olympique de Barcelone…. La Patrie  de Nelson Mandela marque sa renaissance à travers ses athlètes noirs et blancs, défilant pour la première fois ensemble, derrière le même drapeau». L’auteur est, ce jour là, devant son Poste de télévision et vibre d’enthousiasme quand son regard tombe sur les délégations qui succèdent à l’Afrique du Sud : Arabie Saoudite, Emirats Arabes Unis, Iran, Koweit, Qatar… Que des hommes! Coup de fil à ses amies (3), l’avocate française Linda Weil-Curiel et à la Députée belge au parlement Européen, Anne- Marie Lizin..  elles aussi ont vu… C’est de ce choc et de l’indignation que ces femmes ressentent ce jour là que naissent les premières démarches  auprès du CIO. Devant la réticence et les fins de non- recevoir de cette instance, se créera alors le Comité Atlanta +.   Atlanta est en effet la ville des futurs JO de 1996.  Comité qui sera officiellement lancé le 10 janvier 95.

Toute la difficulté réside à faire admettre que l’interdiction des sports aux femmes, ou l’autorisation d’une pratique restreinte ou conditionnée,  est un Apartheid aussi grave que celui concernant la mise à l’écart des Noirs dans une société.  C’est avec détermination que le Comité Atlanta + va demander d’exclure des JO les pays qui interdisent aux femmes la pratique du sport et/ou leur participation aux JO.

Déterminées, ces femmes le sont ! Elles  écrivent, interviennent partout, frappent à toutes les portes des Comités nationaux, du  CIO…. Le CIO freinera des quatre-fers pour s’opposer à leur démarche, leur reprochant de mettre en cause une religion, alors que dans d’autres pays aussi les femmes ne pratiquent pas le sport. Elles font remarquer que c’est souvent par manque de moyens financiers, et non par idéologie que des femmes sont dans l’impossibilité  de parvenir à un haut niveau sportif. Elles demandent que le CIO augmente les moyens mis à la disposition de la formation des athlètes féminines. Mais persistent et signent : l’exclusion pour raison culturelle et religieuse est une réalité discriminatoire à combattre énergiquement. Ce combat doit être l’affaire du Comité international Olympique.

La démonstration de l’apartheid est pourtant évidente, quand on se réfère aux jeux de Téhéran de 1993,  jeux réservés uniquement aux femmes de l’islam au motif : « La République Islamique  n’autorise pas les femmes à participer aux épreuves sportives internationales pour des raisons vestimentaires. Pour les religieux iraniens, une femme ne peut apparaître en public légèrement vêtue et non voilée ». Pourtant le  CIO y  envoie des émissaires.

Mary  Alison Glen Heig pour le CIO et  Mary  Benaham représentante de la FIBA (International Basketball Association) honoreront de leur présence cette manifestation. Mary Benaham ira jusqu’à approuver l’initiative trouvant merveilleux que : «  quand dans le stade, tous les hommes furent exclus de façon permanente, chacune était libre de retirer son vêtement islamique ». Athlètes, public, uniquement féminins monde singulier, monde à part…. Apartheid. C’est la société qu’ont bâtie les mollahs depuis 1979 à l’arrivée de Khomeyni, ils ne peuvent, d’ailleurs,   trouver meilleur soutien pour poursuivre la pression sexiste et violente contre les Iraniennes que cette caution des instances sportives internationales.

Des championnes olympiques ne portent pas, heureusement, le même regard sur cette mascarade olympique. La Marocaine Nawal  El Moutawakel (première médaillée d’Or aux JO de Los Angeles en 1984), véritable icône nationale, déclare :« chaque athlète, homme ou femme, trouve sa récompense dans la réussite de son effort et dans le regard que le monde entier lui porte. Cacher la pratique du sport féminin est le meilleur moyen de la tuer ». L’Algérienne  Hassiba Boulmerka, dans un entretien pour le magazine « Sports » lors des JO d’Atlanta affirme: « Pour ceux qui connaissent un peu le monde sportif ces jeux ne représentent rien. Pour moi  le sport a une certaine image de noblesse. Si on commence par séparer les femmes des hommes, comme on l’a fait pour ces Jeux, c’est la meilleure façon de tuer l’expression féminine ».

Mais, après 93, le lobby islamiste iranien (l’Iran se sent moralement responsable des 500 millions de femmes musulmanes) tente à Brighton en 94, de prouver  que l’islam a été une religion de libération et que ce sont les  JO  qui excluent les femmes : « le vêtement vis-à-vis duquel des règles et règlements stricts peuvent exclure les femmes musulmanes ». Il n’aura de cesse, à partir de là, de faire plier toutes les instances sportives internationales afin d’imposer la visibilité de la sportive musulmane prosélyte, voilée bien sûr !  Obéissance absurde au diktat : pas un cheveu de nos femmes ne doit dépasser de leurs hidjabs, elles sont notre propriété et se doivent avant tout à leur devoir envers  Dieu….! 

 Si le CIO répond négativement, au prétexte qu’on attaque une religion, la démarche du Comité Atlanta + aura plus de succès auprès des instances européennes et de la Commission des Droits de l’Homme. Le conseil de l’Europe prend position sur la question du relativisme culturel et affirme : même s’il existe des différences culturelles et des traditions, ceci ne doit jamais être un argument pour accepter une quelconque discrimination à l’égard des femmes dans le domaine du sport. Il demande  au CIO : «  de prendre une position claire et ferme contre la discrimination à l’égard des femmes dans le domaine du sport » et de refuser son appui à toute manifestation sportive basée sur la discrimination, telle que les Jeux de la solidarité pour les femmes des pays islamiques ». Le parlement européen prend à son tour une résolution(4/7/96) condamnant l’interdiction qui était faite aux femmes par certains gouvernements, de participer aux jeux Olympiques.

Succès aussi auprès de la FIDH (Fédération Internationale des Droits de l’Homme) dont la CDH (Commission des Droits de l’Homme) prie les Etats de prendre les mesures appropriées qui s’imposent pour que les femmes et les hommes participent pleinement, sur un pied d’égalité, sans la moindre discrimination, aux Jeux Olympiques et suivant les principes du mouvement olympique. Ces femmes obtiennent une victoire qui agace encore davantage le CIO….

Le groupe portera avec toujours la même énergie et les mêmes convictions leurs revendications. Elles réussiront dans la mesure ou il y aura plus de femmes musulmanes aux JO, mais échoueront car on  obligera ces femmes  à  affirmer leur identité musulmane sur le stade où le hidjab islamique fera son apparition, et deviendra pour nombre d’entre elles une tenue sine qua non ! ( en contradiction totale avec le principe fondateur des JO : pas de signe politique ou religieux) pour le plus grand bonheur des créateurs de mode et de ce nouveau  business à la sauce islamique!

Des médias ou personnalités s’extasieront de la tenue  profilée de Rakia al- Gassra, une sprinteuse du Bahreïn qualifiée pour la ½ finale du 200m aux JO de Pékin,  parlant d’elle comme d’une héroïne. Outre que cette tenue lui coûte certainement la possibilité d’une accession en finale, Annie pense que : « cette femme sera une héroïne le jour où elle arrachera son costume de bagnarde ». Elle a raison, la véritable héroïne n’est-elle pas, en effet, Hassiba Boulmerka (4), qui, en plein combat contre les islamistes, remporte une médaille d’or aux  JO de Barcelone en 92 et refuse de porter le hidjab imposé aux algériennes ?  ( elle reçoit des jets de pierres parce qu’elle s’entraîne en short). Le courage d’une femme face à l’inefficacité  du Comité International Olympique qui ira de compromissions en abandons  des principes olympiques jusqu’à la capitulation complète! 

Le monde  de l’olympisme n’aidera pas les femmes et n’aura pas beaucoup de fermeté et de détermination contre cette offensive des mollahs, il se montrera d’une couardise affligeante. La FIFA  ne résistera pas non plus face aux pressions de l’Iran! Ce qui est très grave pense Annie c’est que : «  faire entrer le hidjab dans le stade olympique c’est claironner que les musulmanes qui ne le porteraient pas sont de mauvaises musulmanes, puisqu’elles ont désormais le choix de le faire. C’est introduire une distinction entre les athlètes selon qu’elles appartiennent à une religion ou à une autre ».

Il faut lire ce livre qui illustre l’engagement militant et tenace de son auteur qui n’a jamais dévié dans la trajectoire de son combat pour la cause des femmes. Il est aussi riche en enseignements sur le statut de certaines femmes des pays musulmans qui sont soit mises à l’écart ou au contraire exhibées et prosélytes pour la cause islamiste. A Londres encore les doléances seront de mises en juillet 2012…

Au-delà du sort des femmes et de leur droit à la pratique sportive, ce livre nous amène à réfléchir au problème plus large des sociétés face à la détermination des intégristes, Talibans (5) ou  islamistes, et à la manière dont les politiques, les institutions et les sociétés y résistent ou pas…

 

(1) Femmes voilées aux Jeux Olympiques de Annie Sugier aux Editions Jourdan

(2) Annie, militante féministe de la première heure, au côté de Simone de Beauvoir et d’Anne Zélensky, au départ du MLF,  est actuellement Présidente de la Ligue du Droit International des Femmes (LDIF).

(3) Linda Weil- Curiel est avocate

Anne-Marie Lizin : femme politique Belge de premier plan. Députée belge au parlement européen 1979 à 1988 puis Secrétaire d’Etat aux affaires européennes du gouvernement belge.

(4) Pendant 10 ans Hassiba portera haut les couleurs de son pays et l’honneur des femmes libres d’Algérie en participant à de nombreuses compétitions internationales. Première sur 1500m aux JO de Barcelone en 3min 55 30

(5) C’est sous la pression du Comité Atlanta-Sydney, que sera annulée la décision du  CIO d’accueillir, à Sydney,2 observateurs du nouveau régime taliban. Par contre le comité Atlanta+ s’investira toujours pour faire participer les athlètes Afghan(e)s (équipe mixte) aux différents JO.

 

 

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CITOYENS ET FRANCAIS - dans Religions