Nimbées d’une incomparable douceur, auréolées de nostalgie par la mémoire collective, les années qui précédèrent l’horreur de la Grande Guerre sont passées à la postérité sous le nom de Belle Époque. Nous avons désormais un recul suffisant pour voir dans la période qui a succédé aux« Trente Glorieuses » une assez laide époque.
Toucherions-nous enfin au terme de l’interminable tunnel dans lequel nous sommes entrés au milieu des années quatre-vingt ? Est-ce la fin du cycle infernal qui, profitable aux seul(e)s parti(e)s intéressé(e)s, nous condamne depuis une trentaine d’années à cette alternance caricaturale qui a tour à tour porté au pouvoir une droite impopulaire et une gauche discréditée par rejet plus que par adhésion, parce qu’on ne voyait pas d’autre moyen d’être débarrassé de l’une que de voter pour l’autre. Les signaux qu’envoie aujourd’hui l’opinion semblent annonciateurs de temps nouveaux.
Lorsqu’en mai 2012, la droite a été battue, l’état dans lequel elle avait mis la France était assez lamentable. Dette, déficit, désindustrialisation, stagnation, régression, division, corruption, tel était le bilan des deux mandats de Jacques Chirac et du quinquennat de Nicolas Sarkozy.
Les choses ont empiré depuis deux ans. La politique imbécile d’alourdissement des impôts, de compression des dépenses publiques, de baisse du pouvoir d’achat, de défense de l’euro au détriment de l’emploi, de soumission aux consignes de la troïka qui nous gouverne (Commission, Banque centrale européenne, Fonds monétaire international), amorcée sous Sarkozy, poursuivie et accentuée sous Hollande, laisse une France à bout de forces, anémiée, exsangue, sur le bord du chemin.
La nouveauté, réconfortante (il arrive que d’un mal sorte un bien), est que l’opinion a pris conscience de la situation et qu’elle paraît décidée à ne plus tenir quittes de leur faute les responsables de nos malheurs.
Solidaire dans la gestion et dans l’échec – c’est le propre des tandems –, le tandem Hollande-Ayrault plonge dans les abîmes de l’impopularité et semble aussi incapable d’enrayer la spirale de son déclin que d’inverser quelque courbe que ce soit. C’est au niveau record de 17 % que se monte désormais le pourcentage des Français qui font confiance à l’équipe qu’ils ont élue par défaut et, pour la première fois, une majorité de sympathisants socialistes (53 %) rejette le Président qui se prévaut abusivement de leur label.
Or, ce désamour sans précédent ne profite pas à la fausse droite qui se présente comme la seule alternative à la fausse gauche. Les vases (et les boues) ne communiquent plus. 63 % des sondés estiment que l’opposition, si elle était aux commandes, ne ferait pas mieux que le gouvernement.
Si le gouvernement socialiste est discrédité par l’échec, le mensonge et le reniement, l’UMP n’apparaît à des citoyens singulièrement lucides que comme un conglomérat en pleine déliquescence, ...
Dans ces conditions, rien ne serait plus stupide que de céder lors des prochaines consultations à la tentation de l’abstention qui ferait le jeu des installés aux dépens des indignés. Ce serait un comble que le dégoût, l’écœurement, le phénomène de rejet massif dont les deux grands partis de gouvernement sont, à juste titre l’objet, aboutisse une fois de plus à leur reconduction et que les électeurs, croyant les punir, se punissent eux-mêmes.
À droite, à gauche, il existe des propositions, des partis et des hommes qui proposent d’autres politiques et d’autres alternances et d’autres voies que celles à laquelle notre veulerie et notre incivisme nous condamneraient. Le moment est venu de renvoyer conjointement l’UMP et le PS dos à dos. À leur néant.