Chrétiens syriens : bientôt la fin ?
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The réd chef – Mohammad Qataa, adolescent syrien de 15 ans, a été exécuté en public, dimanche 9 juin, à Alep, par les rebelles islamistes qui l’accusaient d’avoir tenu, allèguent-ils, des propos jugés “blasphématoires”. Il aurait déclaré : “Même si le prophète Mahomet descend du paradis, je ne deviendrai pas croyant”.
En mai, les Etats membres de l’Union européenne ont décidé de lever l’embargo sur les armes destinées aux rebelles syriens dont on sait pourtant qu’ils sont en grande partie des islamistes sunnites, pour ne pas dire des djihadistes ultra-religieux et sanguinaires.
Il eut été plus juste de créer un corridor humanitaire pour les chrétiens syriens en direction de zones chrétiennes libanaises pro-occidentales.
Autre fait révélateur : sur les trente mille habitants qui peuplaient la ville syrienne de Qousseir près de la frontière libanaise, ville prise par les rebelles il y a un an, puis reprise la semaine dernière par l’armée du régime syrien, seuls demeurent aujourd’hui 500 habitants.
Et il n’y reste pas un des 3’000 chrétiens qui y vivaient depuis deux mille ans, comme c’est (ou c’était jusqu’à présent) le cas, dans d’autres parties de la Syrie, y compris dans des villages araméens tel Maaloula.
Les images diffusées par la BBC montrent des rues désertes. La plupart des quartiers et des bâtiments ont été détruits par les milices islamiques anti-Assad qui ont aussi profané le monastère de Saint-Élie. Les rebelles syriens ont ainsi rayé de la carte des siècles de présence chrétienne.
Le Père Simon Faddoul, de Caritas, a déclaré que depuis plus d’un an, il n’a plus de nouvelles des chrétiens de Qousseir. La plupart d’entre eux ont fui lorsque la ville est tombée aux mains des rebelles islamistes en 2012. De nombreux chrétiens ont traversé la frontière pour se réfugier au Liban.
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Depuis l'an dernier, de vastes zones de la ville sont ainsi tombées sous le contrôle de brigades salafistes comme Al-Nosra ou d'autres milices salafistes ou de Frères musulmans armés, financés par le Qatar, l’Arabie saoudite, la Turquie et la nébuleuse mondiale d’Al-Qaïda.
Dans nombre quartiers de rebelles, la Charia - dans sa version la plus totalitaire - est appliquée par les islamistes sunnites, souvent non-syriens, qui veulent faire de ce pays le centre du nouveau Califat régional sunnite face aux « Infidèles » alaouites et chrétiens syriens, et leurs alliés chiites irakiens, libanais et iraniens.
Dans la partie Nord du pays, le drapeau syrien est de plus en plus souvent remplacé par celui, Noir, de « l’Internationale salafiste » ou par celui, Vert, de « l’Internationale Frères musulmans ».
Dans ce « jihadistan syrien », les exécutions « d’apostats », de chrétiens, de Druzes, chiites, alaouites, athées, « agents de l’opposition », coupables de ne pas se soumettre à la Charia totalitaire, sont monnaie courante.
Des milliers de Chrétiens (orthodoxes, maronites, arméniens), ont été victimes d’agressions, de rackets, de viols. Beaucoup ont dû quitter leur pays. Et des milliers d’Alaouites civils ont été les cibles des djihadistes sunnites rentrés en croisade contre les sectes issues du chiisme.
Mais les télévisions des pays occidentaux, inféodés aux Pétro-monarchies du Golfe, n’en parlent pas... Cela risquerait de discréditer la folle idée du Trio Fabius-Hollande-Cameron d’armer les islamistes et autres Frères musulmans syriens…
Anthropologue et journaliste syrienne en exil à Paris, Randa Kassis est porte-parole et présidente de l'assemblée générale de la Coalition laïque et démocratique syrienne
Randa Kassis, chrétienne, mais athée, laïque, mais très proche des minorités kurdes et alaouïtes. Donc inclassable et libre. Randa est présidente-fondatrice du Mouvement de la Société pluraliste, qui propose une solution confédérale et pacifique à la crise syrienne.
Elle déplore les exécutions croissantes de « civils soi-disant "pro-régime" ou de “soi-disant” membres des "Chabiyya d’Assad" ». Elle estime que la dérive jihadiste de l’opposition sunnite, coupable de « crimes de guerre », comme le régime, est inacceptable : « J’ai eu vent de plusieurs exécutions d’alaouites, druzes, chrétiens, tués jusque parce qu’ils ne sont pas sunnites.
Pour moi, ces rebelles islamistes n’ont rien à voir avec les premiers démocrates syriens pacifistes qui ne voulaient pas du tout d’un Etat islamique». Randa Kassis explique « qu’avec le temps, les organisations islamistes étrangères, financées notamment par le Qatar, ont discrédité l’opposition au régime de Bachar al-Assad ».
Elle rappelle que le chef même du Front al-Nosra est un Jordanien... que cette mouvance salafiste totalitaire est remplie d’étrangers qui n’ont rien à voir avec les intérêts syriens : Irakiens, Tunisiens, Libyens, Tchétchènes, Algérien, et même afghans, etc.
Elle cite un exemple parmi tant d’autre de la dérive islamiste sunnite quotidienne : dans le check-point d’Alep, la brigade al-Tawhid a interdit à un sunnite laïque de passer le barrage pour aller porter des secours aux civils car il était en short... Or « nos femmes ne peuvent pas voir quelqu’un les jambes nues », lui aurait-on répondu. Un simple avant-goût de la future Syrie réislamisée…