World War D(éflation) 3 : quelles sont vos armes pour lutter ?
Cécile Chevré
Hier, nous avons passé en revue les différents signes de déflation en Zone euro. Je profite de la sortie du nouveau numéro de la Stratégie de Simone Wapler -- qui est entièrement consacré à la déflation -- pour en extraire un tableau très parlant :
Ce tableau reprend les indices de prix à la consommation harmonisés (IPCH) de la Zone euro. A noter, que ces indices ne prennent en compte ni l'énergie, ni les produits alimentaires saisonniers.
Voici le commentaire qu'en fait Simone :
"La déflation frappe surtout les pays qui ont pratiqué l'austérité, à savoir réduit leurs déficits budgétaires, diminué leurs nombres de fonctionnaires et réduit leurs prestations sociales."
Mais revenons à la question que je posais en fin de Quotidienne hier : la déflation est bien présente dans la Zone euro. Mais est-ce grave docteur ?
La déflation frappe surtout les pays qui ont pratiqué l'austérité, à savoir réduit leurs déficits budgétaires, diminué leurs nombres de fonctionnaires et réduit leurs prestations sociales |
Arf... bonne question...
Pour y répondre, il faut s'intéresser aux remèdes traditionnels à la déflation -- je parle évidemment de son versant diabolique, la mauvaise déflation.
L'hélicoptère de sauvetage
Milton Friedman, qui est rappelé d'entre les morts dès que l'on aborde le sujet -- affirmait qu'il n'existait qu'une seule et unique façon de sortir de la déflation : l'hélicoptère qui déverse des tombereaux d'argent liquide sur la population émerveillée de cette soudaine richesse... et qui va immédiatement dépenser ces billets dans le magasin le plus proche.
En gros, la solution à la déflation, c'est l'injection monétaire massive. Donc l'impression (ou l'endettement) pour nos économies qui n'ont plus un seul sou vaillant en poche.
Bon, certes, certes, c'est ce que fait la Fed depuis 2008 ou la Banque centrale du Japon depuis 20 ans -- sans grand effet malheureusement. C'est aussi ce qui explique que certains attendent avec impatience que la BCE reconnaissance le risque de déflation et se décide à intervenir massivement.
La solution à la déflation, c'est l'injection monétaire massive |
Reste à savoir bien évidemment si de telles solutions sont réellement efficaces contre la mauvaise déflation. L'exemple japonais tendrait à prouver que non, pas vraiment.
A ce point de mon raisonnement (j'espère d'ailleurs que je ne vous ai pas perdu en route, cher lecteur, ou que vous ne vous êtes pas suicidé d'ennui en me lisant), il me faut de nouveau faire appel à la vélocité de la monnaie et à ce que Callum Newman vous expliquait dans La Chronique Agora :
"La Fed peut imprimer de l'argent. Mais si personne ne le dépense, cet argent a peu d'effet sur l'économie. La question est donc : si la Fed trouve un moyen de faire augmenter la vélocité, on aura de l'inflation. Si la vélocité augmente vraiment, on verra une gigantesque hausse des prix.
Si la vélocité n'augmente pas, le monde sera embourbé dans un piège déflationniste qui donne des sueurs froides aux banques centrales. Pourquoi ? Parce qu'alors les dettes augmentent en termes réels. Les revenus fiscaux chutent. Les banques font faillite."
Bon, pas simple tout cela n'est-ce pas ? Surtout que je vous sens vous impatienter, vous voulez une réponse : il y a-t-il un vrai danger déflationniste ?
Attention, danger déflationniste en vue ?
Réponse oui. Après tout, la déflation est déjà installée dans les pays périphériques et au vu du peu d'enthousiasme des Allemands ou des Français à consommer et dépenser, le risque est réel.
Cette déflation peut-elle être durable ? Simone Wapler est d'avis que non, comme elle vous l'explique dans le nouveau numéro de sa Stratégie. Parce que la BCE imprimera. Nous l'avons vu, pour nombre de responsables Européens, le danger de déflation sera écarté par la reprise économique, ce qui éviterait à la Zone euro de connaître le sort du Japon. Il faut espérer que ce pari sera gagnant car la BCE n'a que peu d'outils pour aujourd'hui lutter contre cette déflation rampante.
Cette déflation peut-elle être durable ? |
Jusqu'à présent les banques centrales ne sont en effet pas parvenues à faire réellement décoller l'inflation par des injections monétaires même massives. La principale raison en est que cet argent reste contenu dans le cercle bancaire et financier et n'infiltre pas l'économie réelle. L'hypothèse de Simone -- qui est loin d'être la plus réjouissante, il faut bien le reconnaître -- est que nous pourrions passer en quelques mois d'un épisode déflationniste à une situation d'hyperinflation.
Jusqu'à présent les banques centrales ne sont en effet pas parvenues à faire réellement décoller l'inflation par des injections monétaires même massives |
Mais le plus inquiétant dans tout cela, c'est que les banquiers centraux reconnaissent progressivement qu'ils n'ont aucune idée de la manière dont peuvent évoluer les choses. Ces derniers mois, des gouverneurs de la Fed ont multiplié les déclarations qui prouvent ce que nous soupçonnions : les banques centrales fonctionnent à l'aveugle. Voici certaines de ses déclarations :
Charles Evans, Fed de Chicago : "La politique de QE a duré trop longtemps. Elle n'a pas donné les résultats espérés. Je suis très inquiet car le potentiel de conséquences inattendues et non voulues est considérable".
Esther George, Fed de Kansas City : "Cette politique contient des dangers pour la stabilité financière à long terme".
James Bullard, Fed de Saint Louis : "La Fed a placé la barre très haute il sera difficile de sortir de cette politique".
Qu'est-ce que cela signifie pour vous ?
Un investisseur averti en vaut deux. Simone vous propose dans sa prochaine Stratégie une analyse complète du risque déflationniste en Europe et surtout les solutions à mettre en place pour ne pas laisser votre épargne et vos investissements subir le contrecoup. Quels investissements privilégier mais aussi lesquels éviter... Réponse dans la Stratégie.
Privilégiez le cash (et pas en euro) |
Rassurez-vous, je ne vais pas vous laisser comme cela, sans pistes de réflexion pour vos investissements :
- privilégiez le cash (et pas en euro) ;
- évitez les crédits -- à la consommation ainsi que les placements immobiliers qui ne sauront pas vous fournir un rendement suffisant pour compenser les effets que la déflation aura sur vos remboursements ;
- l'or physique conservé hors du secteur bancaire est une bonne idée ;
- et les autres stratégies de diversification (immobilier en SCPI) et de débancarisation (le foncier forestier).
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