La retraite par répartition continue à avantager massivement les fonctionnaires, le tout aux frais des salariés du privé.
Par Philippe Mondin, fondateur d'Expremes.
Le Président François Hollande a annoncé une prochaine réforme des retraites dont l’un des objectifs est une même retraite pour tous. Il faut saluer cette volonté d’instaurer une égalité de tous les Français en matière de retraite : cela sera une grande réforme morale du quinquennat.
Elle devrait recueillir, contrairement au mariage pour tous, un large consensus dans l’opinion publique… sauf parmi ceux dont les privilèges exorbitants, issus d’un passé révolu seront supprimés.
Il faut dire que le Conseil d'Orientation des Retraites (COR) a estimé à 22 milliards d'euros par an les besoins de financement des régimes de retraite à l'horizon 2020, dont 8,6 milliards concernent les seuls régimes de fonctionnaires (hors régimes spéciaux).
La retraite des fonctionnaires
Il doit être reconnu objectivement que le régime de retraite des fonctionnaires s’est rapproché de celui des salariés du privé… mais en reste très éloigné.
Il faut distinguer deux catégories de fonctionnaires : les fonctionnaires de catégorie sédentaire et les fonctionnaires de catégorie active.
Les emplois classés en catégorie active sont des emplois présentant un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles justifiant un départ anticipé à la retraite. Les emplois sont classés en catégorie active par arrêtés ministériels.
Les emplois qui ne font pas l’objet d’un classement en catégorie active sont par défaut automatiquement des emplois de catégorie sédentaire.
Exemples d’emplois classés en catégorie active :
- Fonction publique d'État : personnels de surveillance de l’administration pénitentiaire, éducateurs de la protection judiciaire de la jeunesse, personnels paramédicaux des hôpitaux militaires...
- Fonction publique territoriale : agents des réseaux souterrains des égouts, sapeurs pompiers professionnels, agents de police municipale...
- Fonction publique hospitalière : personnels paramédicaux dont l’emploi comporte un contact direct et permanent avec des malades : surveillants, infirmiers, infirmiers spécialisés, aides-soignants, agents de services hospitaliers, sages-femmes, assistantes sociales dont l’emploi comporte un contact direct et permanent avec des malades, puéricultrice en fonction dans les services de pédiatrie...
Pour les fonctionnaires de catégorie sédentaire, la condition de l’âge légal d’ouverture des droits et la condition de la durée d’assurance requise pour prétendre au temps plein est alignée sur celles des salariés du privé.
Ainsi un fonctionnaire de catégorie sédentaire né en avril 1954 ne pourra liquider sa retraite qu’à 61 ans et 7 mois, devra justifier de 165 trimestres pour prétendre au taux plein.
Si le fonctionnaire n’a pas atteint la durée d’assurance exigée pour le taux plein (la même que pour les salariés du privé), il subit une décote.
Pour les fonctionnaires, elle est passée de 0% pour les générations antérieures à 1946 pour 2011, à 0,625% pour la génération née en 1950, à 1% pour la génération née en 1953 et passera à 1,25% pour les générations nées à compter de 1955 (+ 0,125% par an à compter de la génération 1946). Pour les salariés du privé, la décote a suivi un mouvement de sens inverse : elle est passée de 2,5% pour un salarié né avant 1944, à 1,625% pour la génération née en 1950 et passera à 1,25% pour les générations nées à compter de 1953 (- 0,125% par an à compter de la génération 1944).
L’égalité sera réalisée de ce point de vue pour les générations nées à compter de 1955.
Pour les salariés du privé, l’âge du taux plein automatique passe de 65 à 67 ans. Ainsi un salarié né en avril 1954 ne pourra liquider sa retraite qu’à 61 ans et 7 mois, devra justifier de 165 trimestres pour prétendre au taux plein et si cela lui est impossible, devra attendre l’âge de 66 ans et 7 mois pour bénéficier automatiquement du taux plein.
Pas pour un fonctionnaire sédentaire ! Dans le public, cet âge définit l’âge limite d’activité mais, à titre provisoire, l’âge d’obtention du taux plein automatique - âge pivot - est différent de l’âge limite d’activité.
Un salarié né en avril 1954 devra attendre l’âge de 66 ans et 7 mois pour bénéficier automatiquement du taux plein. Un fonctionnaire sédentaire l’obtiendra dès l’âge de 65 ans et 4 mois ! Ce sujet est rarement évoqué mais il atténue considérablement l’affirmation selon laquelle la durée d’assurance des fonctionnaires a été alignée sur celle des salariés du privé.
Il faut rappeler que le nombre de trimestres retenus pour le calcul de la décote est le plus favorable entre le nombre de trimestres d’assurance manquants pour atteindre celui requis pour le taux plein (165 dans les deux cas, salarié du privé et fonctionnaire sédentaire) et le nombre de trimestres d’âge manquants pour atteindre l’âge du taux plein automatique pour le salarié (66 ans et 7 mois) ou pour atteindre l’âge pivot pour le fonctionnaire (65 ans et 4 mois) !
Qui plus est, le fonctionnaire aura le droit à la surcote à partir de l’âge pivot ! L’égalité ne sera donc effective que pour les générations nées à compter de 1958.
Fonctionnaires de catégorie sédentaire
Dire que les conditions de liquidation des fonctionnaires sédentaires ont été alignées sur celles du privé est faux (cette notion d’âge pivot annule les effets de la décote) mais elles le seront à terme. Et c’est bien l’essentiel : la paix sociale vaut bien quelques années de décalage...
Nous examinerons ultérieurement les modalités de calcul de la pension des fonctionnaires sur lesquelles se focalise le débat et l’attention des médias. Il s’agit clairement d’une tactique de communication de la part des syndicats de fonctionnaires qui consistent à faire oublier qu’il existe de nombreuses autres inégalités de traitement inexplicables et de privilèges injustifiés.
Cette tactique de « l’arbre qui cache la forêt » consiste à ne jamais aborder le régime des fonctionnaires de catégorie active.
Pour les fonctionnaires de catégorie active, l’âge légal d’ouverture des droits passe, pour la plupart d’entre eux, de 55 à 57 ans : l’avantage par rapport aux salariés du privé est donc toujours de 5 ans. Mais qui plus est le calendrier d’évolution de l’âge légal, de l’âge limite d’activité, de l’âge pivot et de l’augmentation de la décote a été décalé de 5 ans.
La décote passe progressivement de 0% pour les fonctionnaires nés avant janvier 1956, de 0,75% par trimestre manquant pour un fonctionnaire né entre janvier et juillet 1956 à 1,25% pour un fonctionnaire né à partir de novembre 1958.
Prenons un exemple : un fonctionnaire de catégorie active né en septembre 1957. Il peut liquider sa retraite à 55 ans et 9 mois contre 62 ans pour un salarié du privé : six ans et trois mois plus tôt ! Il doit avoir validé au moins 166 trimestres (montant non connu à ce jour, probablement 167) ; montant en apparence identique à celui d’un salarié.
Mais, s’il ne compte que 145 trimestres et qu’il liquide sa retraite à 55 ans et 9 mois, sa décote devrait être de 20 trimestres (chiffre maximum). Mais l’âge d’annulation de la décote est 59 ans : par rapport à cet âge, il ne lui manque que 13 trimestres. Il ne subira donc qu’une décote de 13% sur une pension égale à 75% de son dernier traitement indiciaire et percevra plus qu’un salarié de son âge ayant liquidé sa retraite à 62 ans et ayant validé 167 trimestres !
En cas d’insuffisance encore plus importante de trimestres validés, ce même fonctionnaire accédera automatiquement à la retraite à taux plein à compter de 59 ans… le salarié du privé à 67 ans !
S’il existe pour les fonctionnaires de catégorie sédentaire, un alignement à terme programmé des conditions de liquidation sur celles du privé à compter de la génération 1958, la prochaine réforme devra s’attaquer à la suppression du privilège exorbitant dont bénéficient les fonctionnaires de catégorie active.
Tellement exorbitant que ce sujet n’est jamais évoqué.
Ces avantages sont justifiés par des activités présentant un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles. Un instituteur ou un professeur des écoles aurait des fatigues exceptionnelles par rapport à un ouvrier d’usine, un maçon, un chauffeur routier !
La loi a pris en compte pour les salariés du privé, dans la dernière réforme des retraites, la notion de pénibilité. Celle-ci est définie de façon très précise (par décrets ou arrêtés) à partir d’une définition objective des critères de risques ou de pénibilité et des durées d’exposition.
La même retraite pour tous consisterait à appliquer aux fonctionnaires de catégorie active, ces critères et, pour ceux qui y répondent, de leur accorder les mêmes avantages à savoir l’exemption de l’allongement de deux ans de l’âge légal d’ouverture des droits (60 au lieu de 62) ou de l’âge du taux plein automatique (65 ans au lieu de 67 ans) et le bénéfice de la retraite à taux plein quel que soit le nombre de trimestres validés.
Venons-en à la formule de calcul de la pension de retraite des fonctionnaires (de catégorie sédentaire ou active). La pension d’un fonctionnaire est égale à trois quarts du dernier traitement indiciaire brut non plafonné.
Il s'agit du traitement indiciaire brut du dernier emploi, grade, classe et échelon effectivement détenus depuis six mois au moment de la cessation des services valables pour la retraite.
Pour les salariés du privé, la pension est égale est à 50% du salaire annuel moyen limité au plafond de Sécurité Sociale, calculé sur les 25 meilleures années.
Entendre Madame Le Branchu, ministre de la fonction publique, proclamer sur toutes les radios que la formule de calcul sur les 25 meilleures années favorise les salariés parce que ceux-ci terminent leur carrière avec un salaire inférieur à celui qu’ils percevaient en milieu de carrière relève d’un cynisme ou/et d’une incompétence atteignant des sommets.
Outre le fait de reconnaître que les carrières des salariés sont soumises à des vicissitudes qu’ignorent les fonctionnaires dont le salaire augmente régulièrement tout au long de leur carrière quelles que soient leurs performances individuelles ou la santé financière de leur employeur, Madame Le Branchu ignore-t-elle que la réforme de 1993 faisant passer le nombre des meilleures années retenues de 10 à 25 s’est traduite par une baisse d’au moins 10 % du montant des pensions versées ? Madame Le Branchu ignore-t-elle que les coefficients d’indexation utilisés pour revaloriser les assiettes de cotisations constituent une véritable pénalité « cachée » ?
Madame Le Branchu ignore-t-elle ce que tout fonctionnaire connaît et ce qui a été objectivement mesuré : « le coup de chapeau » ?
Le mode de calcul de la pension des fonctionnaires est l’occasion de dérives et d’effets pervers : dans le semestre servant de base au calcul de la retraite, une majorité de fonctionnaires bénéficie d’une majoration d’échelon ou de grade, d’une augmentation de leur traitement indiciaire.
Un faible coût pour l’administration qui octroie, pour quelques mois, une augmentation de salaire mais une charge énorme - un gonflement artificiel de la pension qui sera versée pendant des dizaines d’années - pour l’État donc pour l’ensemble des contribuables français.
Et comment entendre Madame Touraine affirmer, sans être contredite, sur toutes les radios que le taux de remplacement des salariés (∑ des pensions de retraite / dernier salaire d’activité) est de 75% comme pour les fonctionnaires… tout en reconnaissant que les salaires du public sont, en moyenne, plus élevés que ceux du privé ! Incompétence ou cynisme ? Nous affirmons qu’aucun retraité du privé n’atteint ce taux. Comment le pourrait-il avec un régime de base qui ne lui assure que 45% de la part de son salaire inférieure au plafond de la Sécurité Sociale ! Même si l’on tient compte des retraites complémentaires des salariés du privé ARRCO et AGIRC, le taux de remplacement d’un non cadre est aujourd’hui de l’ordre de 60 % si son salaire moyen a toujours été inférieur au plafond de Sécurité Sociale.
Un cadre « moyen » dont le salaire passerait progressivement et linéairement de 1 PASS (37.032 €) en début de carrière à 2 PASS (74.064 €), plafond atteint cinq à dix ans avant de liquider sa retraite, aurait un taux de remplacement de l'ordre de 45% à 50 %.
Un salarié cadre supérieur (l’équivalent d’un « haut » fonctionnaire) dont le salaire passerait progressivement de 1 PASS en début de carrière à 8 PASS, plafond atteint 5 à 10 ans avant de liquider sa retraite aurait un taux de remplacement de l'ordre de 25% à 30%.
Mais là aussi, cette question essentielle ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt.
Il existe beaucoup d’autres scandales.
- La définition de la durée d’assurance
La durée d'assurance est l'ensemble des trimestres afférents aux services et bonifications pris en compte en liquidation et auxquels s'ajoutent les périodes retenues par les autres régimes de base obligatoires (périodes assimilées ou équivalentes).
La durée d’assurance n’est pas décomptée de la même manière dans les deux régimes. Dans le régime général, les trimestres sont validés à partir du salaire versé : il suffit d’avoir cotisé sur la base de 1.844 € pour valider un trimestre en 2012, même si on a travaillé qu’un mois. En revanche, dans la fonction publique, les trimestres sont validés à partir du temps effectivement travaillé, au prorata du temps de travail pour les agents à temps partiel (sauf si au moins égal à 80%). C’est le seul paramètre défavorable par rapport au privé.
Pour les instituteurs, le temps passé à l'école normale à partir de l'âge de 18 ans est considéré comme une durée de service effectif.
Mais le vrai scandale latent réside dans les bonifications. Prenons, par exemple, les bonifications dites du 1/5ème
Elles sont accordées dans la limite de 5 ans proportionnellement à la durée des services accomplis par certains personnels de la police nationale, de l'administration pénitentiaire, des douanes, de la navigation aérienne ainsi qu'aux militaires. Pour être clair, ces personnels s’ils travaillent 25 ans (100 trimestres) se voient crédités de 30 ans de service effectif soit 120 trimestres. Ils se voient crédités « gratuitement » de 20 trimestres par rapport aux salariés du privé !
Les cas de bonifications sont aussi nombreux que les abattements pour frais professionnels accordés aux entreprises de la région Bourgogne Franche Comté par Monsieur Edgar Faure.
Citons : les bonifications pour services hors d’Europe accordées au titre du dépaysement. Le taux de la bonification est, en règle générale, du tiers de la durée des services (dans certains cas, il est du quart ou de la moitié). Six ans de service hors Europe valideront huit années de service effectif.
« Les bénéfices de campagne » c’est-à-dire les périodes accomplies à bord des bâtiments de la marine nationale ou dans le cadre des opérations extérieures qui s’ajoutent à la période de service militaire proprement dite. La valeur du bénéfice de campagne est variable. Elle peut être du double (opérations de guerre), simple ou de moitié et augmenter, respectivement, les services effectifs du double de leur durée (1 an de services compte pour 3 ans), de la totalité (1 an de services compte pour 2 ans) ou de la moitié de celle-ci (1 an de services compte pour 18 mois).
Auxquels s’ajoutent « les bonifications pour services aériens ou sous-marins commandés »
Ces bonifications, outre leurs conséquences sur la durée d’assurance, permettent de faire passer le coefficient de la pension de 75 à 80% (après coup de chapeau).
- Les rémunérations non soumises à cotisations sociales
Madame Touraine a déclaré qu’il faudrait néanmoins, pour atténuer les efforts demandés aux fonctionnaires, tenir compte que « des primes qui sont versées à un certain nombre de fonctionnaires ne sont pas prises en compte dans la base de calcul des retraites ».
Comment un ministre de la Sécurité Sociale peut-elle ainsi déclarer que des éléments de la rémunération des fonctionnaires peuvent ne pas être soumis à cotisations sociales ! Alors que ses services traquent dans les PME le moindre avantage en nature de quelques dizaines d’euros non soumis à cotisations sociales et que son gouvernement a signé l’arrêt de mort de l’épargne salariale en imposant un forfait social de 20 % sur les sommes versées aux salariés qui ne sont pas, elles, de par la loi, des éléments de rémunération.
La pension de retraite des fonctionnaires est calculée sur le traitement indiciaire (+ la nouvelle bonification indiciaire NBI).
Les fonctionnaires ne cotisent pas pour leur retraite principale sur le supplément familial de traitement, l’indemnité de résidence, les primes et indemnités diverses perçues en raison des fonctions exercées, les heures supplémentaires effectuées en raison de la qualification acquise, les avantages en nature, qu’il s’agisse ou non de la contrepartie d’une contrainte dans l’exercice des fonctions, pour leur valeur fiscale déclarée, l’intéressement lorsqu’il existe, les indemnités de jury de concours, l’indemnité de garantie individuelle du pouvoir d’achat (Gipa), les primes de vie chère (40%) et d’indexation (13,8%) propres à l’outre-mer, les astreintes versées mensuellement à certains agents
Les fonctionnaires ne cotisent pas pour leur retraite principale sur ces sommes mais ils doivent désormais cotiser au régime de la Retraite Additionnelle des Fonctionnaires RAFP. Il est donc complètement mensonger d’affirmer que les fonctionnaires ne cotisent pas sur leurs primes et qu’ils ne disposent pas de régime de retraite complémentaire.
Le décret n°2004-569 du 18 juin 2004 indique que les fonctionnaires doivent cotiser sur l’ensemble des éléments de rémunération de toute nature mentionnées à l’article L.136-2 du code de la sécurité sociale, à l’exception de ceux qui entrent dans l’assiette de calcul des pensions dans le régime des pensions civiles et militaires de retraite ou dans le régime de la CNRACL.
« La référence à l’article L.136-2 du code de la sécurité sociale (qui définit l’assiette de la CSG) n’implique cependant pas que ces rémunérations soient soumises à la CSG ».
Il s’agit donc d’une définition par défaut : les fonctionnaires doivent cotiser sur tous les éléments de rémunération qui n’entrent pas dans le cadre de leur traitement indiciaire (+ la nouvelle bonification indiciaire NBI).
Le plafond de l’assiette de la cotisation RAFP est fixé à 20 % du traitement indiciaire brut annuel.
Le taux de cotisation est de 10 % du montant de l’assiette : 5% sont à la charge du fonctionnaire et 5% sont à la charge de l’employeur donc des contribuables.
La cotisation à la charge des fonctionnaires est déductible de leurs revenus.
La règle de calcul de l’assiette est celle d’un « calcul mensuel cumulé glissant » : l’employeur applique le plafond tous les mois.
La valeur d’acquisition du point est égale au 1er janvier 2013 à 1,0850 €
La valeur de service du point est égale au 1er janvier 2013 à 0,04421 €
Soit un rendement instantané de 4,7% relativement faible par rapport à celui des régimes complémentaires du privé ;
La retraite RAFP peut être liquidée à l’âge légal d’ouverture des droits dans le régime des fonctionnaires de catégorie sédentaire (60 à 62 ans).
L’initiative de la création du RAFP (sous un gouvernement d’un autre bord) est pour le moins curieuse car il existait et il existe une solution beaucoup plus simple : celle de l’égalité entre tous les Français à savoir que les règles de soumission des rémunérations à cotisations sociales soient identiques entre salariés du privé et salariés du public.
Les cotisations encaissées par le RAFP en 2011 s’élèvent à 1,7 milliards d’euros (soit une charge pour l’État de 850.000 millions d’euros).
Compte tenu du taux de cotisation de 10 %, c’est donc 17 milliards de primes ou indemnités versées à des fonctionnaires qui échappent aux autres cotisations sociales !
Chiffre largement sous-évalué car rappelons que l’assiette du RAFP est plafonnée à 20 % du traitement indiciel (le montant des primes ou indemnités qui dépassent 20% du traitement indiciel échappe à toute cotisation, RAFP ou retraite principale).
Les régimes spéciaux
Si l’attention des médias a été focalisée sur la retraite des fonctionnaires, le sujet des régimes spéciaux est rarement abordé.
Il faut dire que si le régime de retraite des fonctionnaires n’est déjà pas simple à comprendre, la multiplicité des régimes spéciaux et leur opacité découragent beaucoup de journalistes.
Il s’agit de régimes institués la plupart du temps dans des entreprises publiques.
Les règles de ces régimes ont été définies par les organisations syndicales représentatives de ces entreprises… il y a très longtemps et elles aboutissent à des avantages exorbitants consentis aux salariés (retraites à 55 ans voire à 50 ans…)
Sujet tabou auquel vient s’ajouter le problème d’une évolution démographique très défavorable, de la dégradation continue du rapport entre cotisants et retraités.
Dans un rapport de la Cour des Comptes, son président Didier Migaud ne manquait pas d’idées pour mettre à contribution les retraités aisés c’est-à-dire imposables.
L’une de ses suggestions a déjà été retenue avec l’institution de la CASA (prélèvement de 0,3% sur les retraites) qui devrait rapporter, en année pleine, 600 millions d’euros.
Quelques pages plus loin, on pouvait lire, toujours sous la plume de Didier Migaud, que l’État donc les contribuables devrait verser en 2013, 6,5 milliards d’euros pour assurer l’équilibre financier des régimes spéciaux dont 4,2 milliards d’euros pour les seules SNCF et RATP.
A cela s’ajoute encore 1,2 milliard d’euros de contribution tarifaire d’acheminement pour financer les régimes de retraite des agents d’ EDF et GDF soit, au total, 7,7 milliards d’euros.
Alors que EDF a annoncé des augmentations faramineuses de tarif, aucun journaliste n’a signalé que sous le terme « contribution tarifaire d’acheminement », tous les consommateurs sont mis à contribution pour financer l’équilibre d’un régime de retraite ultra privilégié par rapport à celui qui leur sera ou leur est appliqué… en rappelant que les 300.000 agents actifs et retraités d’EDF et GDF
bénéficient d’un tarif « agent » qui représente 5 à 10 % du tarif public EDF et que le comité d’entreprise d’EDF - « une institution livrée à elle-même, sapée par les gaspillages et les dysfonctionnements en tout genre » selon la Cour des Comptes - , perçoit 1 % du CA (et non de la masse salariale)
À la SNCF, les cotisations ne couvrent que 36 % des charges de pensions. La subvention d'équilibre au régime de la SNCF est de 3,4 milliards d’euros. Le nombre de retraités à la SNCF est 342 117 (contre 156 405 cotisants). Chaque retraité de la SNCF coûte, chaque année, 10.000 € aux contribuables français
La réforme Sarkozy de 2008 n’a rien changé : à la SNCF, en 2011, l’âge moyen de cessation d’activité est passé à 51 ans pour les conducteurs (contre 50 ans avant les réformes) et à 55 ans et 10 mois pour les autres agents (contre 55 ans avant les réformes). Qui plus est, les quelques résultats obtenus à la marge, affichés comme une victoire, l’ont été au prix de concessions salariales qui se sont révélées plus coûteuses que les économies réalisées (selon un rapport de parlementaires… UMP).
Peut-on imaginer l’État verser 6,5 milliards d’euros pour contribuer à l’équilibre des régimes ARRCO et AGIRC et éviter que des mesures d’économie soient prises comme à l’occasion de l’accord du 13 mars dernier ?
Bien entendu, non. Interrogée, Madame Touraine répond que cela constituerait une « intrusion inadmissible » pour les partenaires sociaux. C’est aux partenaires sociaux de prendre les décisions nécessaires - comme cela vient d’être le cas - pour assurer l’équilibre des régimes aussi pénibles soient elles pour les cotisants et les retraités (baisse des rendements, non indexation des retraites, suppression des majorations familiales, hausse des cotisations).
Le rapport Moreau propose essentiellement de s’attaquer aux retraités du privé peu susceptibles de descendre dans la rue et de prendre les français en otage en faisant grève.
L’alignement du taux maximal de CSG de 6,6% applicable aux pensions sur celui des revenus d'activité à 7,5% devrait procurer un gain estimé à 2 milliards par an à l'horizon 2020. La fiscalisation des majorations de pension pour les parents de 3 enfants et plus devrait rapporter environ 900 millions d'euros. La suppression ou la réduction (associée alors à la réduction de son plafond) de l’abattement de 10 % pourrait augmenter l’impôt de 1,5 à 3 milliards d’euros.
Au total, une hausse des prélèvements sur les retraités « riches » - c’est-à-dire imposables - de l’ordre de 5 milliards d’euros. Un chiffre considérable… et pourtant très inférieur aux 7,7 milliards que coûtent aux contribuables français, les régimes spéciaux de retraite.
Il est grand temps qu’au nom de l’égalité des Français devant la retraite, l’État laisse les régimes de retraite spéciaux s’auto-gérer et assumer leurs responsabilités c’est-à-dire prendre les décisions qui s’imposent pour assurer leur équilibre financier.
Monsieur Hollande a annoncé qu’il aurait le courage politique, dans le cadre de la prochaine réforme, de s’attaquer aux inégalités de traitement entre régimes de retraite au nom de la morale et de la nécessaire réduction des dépenses publiques. Attendons ! C’est la crédibilité internationale de la France qui est en jeu.
Il en va aussi de sa crédibilité personnelle vis-à-vis des électeurs français : comment peut-on parler de moralisation lorsqu’on envisage de faire payer aux retraités du privé le financement des privilèges exorbitants de salariés qui peuvent partir, ou de retraités qui sont partis en retraite à 50 ou 55 ans avec 75 % de leur dernier salaire ? Il n’existe qu’une solution : l’égalité de traitement, les mêmes règles pour les salariés du privé et les salariés du privé, la même retraite pour tous.
---
Sur le web
source
Les fonctionnaires bien mieux payés que les salariés du privé