Le succès du film, sorti l’été dernier, a attiré des militants dans l’association de lutte contre le sida. Les nouveaux venus, « beaucoup trop politisés » selon les anciens, ont souhaité faire de la question des migrants une priorité. Après des échanges tendus, l’équipe dirigeante a claqué la porte samedi. (…)
Les membres du conseil d’administration reprochent aux derniers arrivés de vouloir s’imposer trop vite. Ils dénoncent « l’entrisme » de ces militants. Majoritairement issus de la lutte antiraciste, ils souhaitent donner davantage de place à la question des migrants. « Pour eux, le combat contre le sida n’est plus une priorité », regrette Rémy Hamai. (…)
Rémy Hamai, président démissionnaire d’Act Up-Paris, dénonce un « entrisme politique » des nouveaux militants. (…)
D’où venaient ces « militants politiques » ?
Parlez-vous d’entrisme ?
Oui, c’est exactement ce que l’on dénonce, à contrecoeur, car on aurait préféré ne pas avoir à étaler toutes ces dissensions sur la place publique. Mais il est important de mettre au jour ces tentatives de détournement à visée politique que j’ai vécues à Act Up, et aussi constaté de mes propres yeux dans d’autres associations, dans d’autres collectifs, ou d’autres syndicats…
Lesquels ?
Des associations féministes, notamment. Mais il leur appartient, à leur tour – ou non -, de dénoncer cet entrisme.
Vous parlez de détournement de cause… Comment cela s’est-il manifesté ?
Au début, ces militants sont arrivés avec un discours universitaire très argumenté, qui s’est peu à peu fait virulent, et qui prétendait nous faire changer de façon de militer. A Act Up, la tradition veut que l’on parte d’abord du « coeur » de notre mission, à savoir la lutte contre le sida, puis qu’on élargisse aux questions de causalités et de discriminations qui sont reliées. Dans ce cadre, bien sûr que nous sommes amenés à nous pencher sur la question des migrants séropositifs, par exemple, et sur l’aide spécifique dont ils ont besoin ! Mais les militants qui nous contestaient, eux, voulaient inverser l’ordre de réflexion et de priorité. En gros : parler migrants, puis, éventuellement, sida. Au fur et à mesure, les échanges se sont durcis. Et nous, les « anciens », qui ne supportions pas de voir la question du sida reléguée, et qui questionnions leur façon de voir les choses, nous nous faisions traiter de « racistes » ! Ça n’était plus tenable. (…)