Jusqu’à il y a peu, le débat sur l’insécurité était centré sur la réalité ou non de la hausse de celle-ci. Mais face à l’explosion des violences, ceux qui niaient purement et simplement cette hausse hier ont muté vers un fatalisme de l’insécurité, phénomène qui serait uniforme en Occident et contre lequel on ne peut rien.
Mais ce fatalisme ne tient pas plus. Comme le démontrent de multiples classements internationaux, la France n’est pas victime d’un phénomène inéluctable. La France est bien le pays le plus dangereux d’Europe, et c’est à cause de politiques publiques inefficaces, voire mauvaises.
Le temps où l’on niait l’insécurité
Il y a encore peu de temps, on niait encore la hausse de la violence. Pendant longtemps, par exemple, était brandi l’argument selon lequel le nombre d’homicides en France serait en baisse depuis les années 1990…
Mais non seulement les chiffres récents donnent tort à cet extravagant argument (la France a repassé les 1.000 homicides, en 2023), mais surtout, celui-ci ne regardait ses chiffres qu’à partir du sommet des homicides, atteint dans les années 1990. En effet, selon l’INSERM, il y a aujourd’hui 3 fois plus d’homicides que dans les années 1960 et 1970…
Mais le débat sur l’insécurité a connu un tournant à l’été 2020. Cet été-là, Éric Dupond-Moretti, tout juste ministre de la Justice, y allait d’une déclaration tout droit sortie des années 1980, qui fait polémique et qui le poursuit encore : « Le sentiment d’insécurité est de l’ordre du fantasme. Il faut s'adresser à l'intelligence des Français et pas à leurs bas instincts. »
La polémique qui a suivi a appris au ministre que les temps avaient changé…
L’insécurité n’est pas une fatalité
Aujourd’hui, cette position est intenable : la vérité est trop criante, trop sanglante. Alors, on entend l’écho de la nouvelle position de ceux qui ne veulent rien changer : le fatalisme. Pourtant, comparatif après comparatif, la situation sécuritaire de la France donne tort à ce nouvel argument. Cette triste réalité, accessible à tous ceux qui connaissent le reste de l’Europe, est confirmée par les chiffres, comme le tout nouveau classement Numbéo des pays les plus dangereux en 2024. Controversé en France (peut-être parce qu’il donne de mauvais résultats ?), ce site Internet classe les pays sur des dizaines de critères allant du coût de la vie au niveau des soins de santé. Cette année, après plusieurs éditions où la France se situait dans le trio de tête en matière d’insécurité, en 2024, la France est classée pire pays d’Europe en termes de sécurité.
Mais ce classement, qui se base sur la perception subjective des utilisateurs du site Internet, n’étonne que ceux qui n’ont pas voulu voir la réalité.
La France, championne d’Europe
Si les comparaisons internationales ne sont jamais aisées en matière de criminalité, certains éléments objectifs permettent de largement confirmer la gravité de la situation. La France est, par exemple, le pays avec le plus grand nombre d’homicides en valeur absolue de toute l’Europe (avec 1.010 homicides en 2023), bien plus élevé que des pays comparables comme l’Italie, qui n’en enregistrait que 285 en 2023, ou l’Allemagne, plus peuplée, qui en enregistrait moins de 800.
Mais la France est surtout le pays des agressions. Les coups et blessures volontaires sont le fléau français. À l’échelle nationale, leur nombre a été multiplié par 7 ou par 8 depuis les années 1980. Il y avait 110.000 victimes de coups et blessures, en l’an 2000. Il y en a près de 300.000 en 2023.
D’ailleurs, l’office statistique européen Eurostat sacre la France pire pays d’Europe en matière de coups et blessures volontaires par habitant. 523 coups et blessures volontaires par habitant en France, contre 101 en Italie, 43 en Espagne et 147 en Allemagne…
Un gouffre très conséquent qui a de quoi justifier les demandes répétées des Français de plus de sécurité et de quoi faire réfléchir les derniers tartufes de l’insécurité qui, avec le temps, ne sont même plus à l’abri, dans leurs quartiers protégés.