Le ministre de l’Économie va tailler dans les dépenses de santé et les niches fiscales : c’est l’annonce faite par Bruno Le Maire à l’occasion des Assises des finances publiques. Les oppositions craignent le retour d’une politique d’austérité.
«Au moins 10 milliards d’euros» : Bruno Le Maire a engagé la chasse aux dépenses ce 19 juin, à la faveur des Assises des finances publiques à Bercy.
Accompagné du ministre chargé des Comptes publics, Gabriel Attal et de la Première ministre Elisabeth Borne, il a détaillé les contours des coupes budgétaires à venir, affirmant vouloir «protéger notre nation contre la dette».
La santé, l’emploi et l’énergie en ligne de mire
Sont d'abord visées «les dérives» des dépenses de médicaments, mais aussi l’explosion des arrêts maladie, dans un secteur de la santé éprouvé par la crise sanitaire.
Autre chantier où le ministre entend faire des économies : l’emploi. Le ministre estime en effet que «le coût des aides à l’emploi doit diminuer» quand le taux de chômage diminue. S’agissant de l’énergie, ce sont les avantages fiscaux à destination des professionnels qui seront affectés, comme les agriculteurs et les transporteurs routiers.
Un pari risqué justifié par la transition écologique mais qui risque de provoquer l’agacement de métiers qui ont une capacité de mobilisation et de blocage forte. Les oppositions craignent une politique d’austérité Bruno Le Maire a tenu rapidement à répondre aux potentielles inquiétudes sur le retour des politiques d’austérité. «Nous ne proposons ni austérité, ni angélisme : nous proposons la responsabilité», a-t-il ainsi affirmé.
Une promesse qui n'a guère rassuré les oppositions, au premier rang desquelles le Parti communiste, dont l’organe de presse, L’Humanité, parle déjà de «grand raout de l’austérité».
Dès le 18 juin, le syndicat Force ouvrière, en première ligne contre la réforme des retraites, dénonçait «la domination d’un credo d’austérité truffé d’invraisemblances». Le spectre de nouvelles mobilisations sociales pourrait donc agiter les partenaires sociaux pour le vote du budget 2024 à l’automne.
Chez les souverainistes, c’est l’ancien eurodéputé Florian Philippot qui s’est insurgé sur les réseaux sociaux contre les 10 milliards d’économies «sur les soins, les aides au logement, à l’emploi». Pour le président du parti Les Patriotes, «10 milliards, c’est justement ce qu’on a déjà claqué en Ukraine. C’est aussi notre contribution nette au budget de l’UE ! Stop !»
La puissante Association des maires de France, dirigée par le LR David Lisnard, a elle aussi fait part de son désaccord «sur l’analyse comme sur les conséquences» des déclarations ministérielles.
Une dette publique qui inquiète les décideurs français
Par ces coupes, l’objectif d’Emmanuel Macron est de réduire les dépenses publiques de 57,5% du PIB aujourd’hui à 53,5 % en 2027 et de revenir sous les 3% de déficit d’ici la fin du quinquennat pour se mettre en conformité avec les normes européennes.
Avec une dette publique passée de 97,4% du PIB à 111,6% en 2022, l’État français se sait menacé par les agences de notation. L’agence américaine Fitch a ainsi déjà dégradé la note de la France de AA à AA-. La France et ses près de 3 000 milliards d’euros de dette détient le plus haut niveau d’endettement parmi les pays notés AA par les agences de notation.
Une situation qui inquiète les décideurs politiques, qui craignent de voir les investisseurs se reporter sur d’autres marchés. La chasse aux dépenses engagée par le gouvernement ne devrait cependant pas s’accompagner d’une hausse des impôts.
Ainsi, la Première ministre semble s’en tenir à la volonté du président de ne pas augmenter l’imposition des ménages. Si elle est encore aux manettes pour défendre le budget 2024, Elisabeth Borne devra composer avec l’Assemblée nationale pour faire voter son texte et éviter un énième 49.3. Un impératif dont elle a conscience puisque celle qui est encore à Matignon a affirmé vouloir «associer plus étroitement les parlementaires».